Le microbiome intestinal, un avantage de taille pour les athlètes

Lorsque quelques millisecondes peuvent faire la différence entre l'argent et l'or, les athlètes d'endurance dans des sports tels que le marathon, le cyclisme, l'aviron et la natation optimisent chaque aspect de leur physiologie pour obtenir un avantage compétitif.Bon nombre de ces efforts ont pour effet d'améliorer les performances des mitochondries, ces minuscules mais puissantes centrales de production d'énergie situées à l'intérieur des cellules. Un dosage d'exercices soigneusement calibré, combiné à un stress bénéfique – altitude, froid et chaleur – et à une récupération optimisée alliant nutrition, méditation et sommeil, ont un effet positif sur le nombre et la santé des mitochondries dans les cellules de vos muscles, de votre cœur et de votre cerveau.Mais il existe un autre aspect de l'entraînement d'endurance qui a peut-être été largement négligé par les athlètes et les entraîneurs: le rôle du microbiome intestinal dans l'optimisation de la santé et de la forme des mitochondries.Médecin scientifique et gastro-entérologue, j'étudie depuis plus de 20 ans l'influence de l'alimentation sur le rôle du microbiome intestinal dans la santé et la maladie. Si la recherche évaluant les effets de l'alimentation sur le microbiome et les mitochondries améliore notre compréhension de pathologies telles que l'obésité, le cancer, la polyarthrite rhumatoïde et la maladie d'Alzheimer, elle pourrait également aider les athlètes à atteindre de nouveaux niveaux de performance grâce à des approches novatrices en matière de nutrition.Des microbiomes et des mitochondriesLe microbiome intestinal, une usine cachée de micro-organismes hautement collaboratifs dans vos intestins, assure le bon fonctionnement de votre métabolisme, de votre système immunitaire et de votre cerveau. Certains chercheurs le comparent à un organe supplémentaire qui détecte les apports nutritionnels, fabrique des molécules de signalisation et prépare l'organisme à réagir de manière appropriée.La recherche a montré que les athlètes d'endurance ont des microbiomes intestinaux différents de ceux de la population générale. La composition et la fonction de leur microbiome, comme la production accrue d'un acide gras à chaîne courte appelé butyrate, sont associées à une augmentation de la VO2 max, un critère de condition physique qui mesure votre capacité à consommer de l'oxygène au cours d'un exercice intense. Un organisme en particulier, baptisé Veillonella, est présent chez certains coureurs d'élite et peut contribuer à élever le seuil de lactate, une mesure de la condition physique étroitement liée à la fonction mitochondriale et à la durée pendant laquelle un athlète est capable de soutenir un effort intense.À lire aussi: Certaines bactéries intestinales peuvent réduire le taux de cholestérolUn microbiome sain communique avec les mitochondries, ces minuscules structures à l'intérieur des cellules qui convertissent les calories en énergie cellulaire brute nécessaire à la contraction des muscles et à d'autres fonctions essentielles. Pour ce faire, il transforme les composants alimentaires non digérés d'une alimentation saine – tels que les fibres, les graisses polyinsaturées et les polyphénols – en molécules qui augmentent la quantité et la santé de vos mitochondries.Certains de ces métabolites – notamment le butyrate, l'acide linoléique conjugué et l'urolithine A – se sont révélés capables d'améliorer la force et l'endurance musculaires spécifiquement. La combinaison de l'exercice et d'une alimentation riche en fibres, en polyphénols – un composé chimique provenant des plantes – et en graisses saines peut donc augmenter la capacité mitochondriale et améliorer la performance sportive.Gaffes et lacunes nutritionnellesUne alimentation saine est essentielle à la santé du microbiome et des mitochondries. À l'inverse, les régimes ultra-transformés ont été associés à des pathologies allant de l'obésité et du cancer aux maladies auto-immunes et à la maladie d'Alzheimer. Certains pensent que les athlètes sont protégés des effets néfastes des régimes ultra-transformés en raison des effets bénéfiques de l'exercice physique. Bien que cela soit partiellement vrai, il est important de prendre en compte d'autres facteurs dans l'alimentation, au-delà des seules calories brûlées.Les additifs utilisés pour améliorer le goût et l'apparence des aliments, comme les émulsifiants, peuvent avoir un effet négatif sur le microbiome intestinal, compromettre la barrière intestinale et provoquer une inflammation systémique, un état malsain lié aux maladies métaboliques, au cancer, aux affections auto-immunes et aux maladies neurodégénératives. Les aliments ultra-transformés ont également éliminé des facteurs clés tels que les fibres, les polyphénols et les graisses saines présents dans les aliments entiers, qui favorisent la santé intestinale et signalent aux mitochondries qu'il y a des calories à métaboliser.À lire aussi: Les émulsifiants augmenteraient le risque de diabète de type 2Les boissons, shakes, barres et gels utilisés pour les sports d'endurance sont des aliments transformés formulés pour fournir une énergie concentrée et accessible pendant un exercice intense. Bien que malsains dans d'autres contextes, ils peuvent s'avérer essentiels pour améliorer les performances lors d'épreuves d'endurance de longue durée, lorsque l'organisme épuise sa propre version d'hydrates de carbone accessibles, appelée glycogène.Mais il est important d’accompagner ces compléments énergétiques d’une alimentation saine dans les heures de récupération qui suivent l'exercice. La combinaison d'une alimentation de base malsaine et d'un exercice de haute intensité pourrait compromettre la barrière intestinale et augmenter l'inflammation. Ce phénomène a été associé à divers problèmes liés à l'entraînement, notamment des troubles gastro-intestinaux, des blessures musculo-squelettiques et des maladies respiratoires.Des microbes qui améliorent les performancesLa réintroduction d'une alimentation riche en aliments ayant un effet positif sur le microbiome (haricots, noix, graines, céréales complètes, fruits et légumes) pendant la phase de récupération de l'entraînement peut aider la plupart des gens à prévenir les effets néfastes d'un exercice de haute intensité et à optimiser leurs performances.Toutefois, en raison d’un mauvais usage des antibiotiques et des régimes transformés, certaines personnes ne disposent pas des microbes clés et de la machinerie métabolique nécessaires pour convertir les fibres et les polyphénols en molécules utiles à l'organisme. Cette carence peut expliquer pourquoi certains aliments et régimes sains peuvent ne pas bénéficier ou convenir à tout le monde.Les régimes alimentaires sains pourraient alors bénéficier de la réintroduction de microbes-clés dans le tractus gastro-intestinal. La recherche a montré que des souches spécifiques de bactéries probiotiques peuvent améliorer la fonction de barrière, réduire l'inflammation systémique et potentiellement améliorer les performances athlétiques en atténuant les effets secondaires de l'exercice à haute intensité. Une autre approche consiste à augmenter la consommation d'aliments fermentés, tels que le yaourt et les légumes marinés, qui peuvent accroître la diversité du microbiome et réduire l'inflammation systémique.Dans certains cas, les aliments sains peuvent également être complétés en fournissant directement à l'organisme des métabolites-clés produits par les microbes. La recherche montre que ces métabolites – également appelés postbiotiques ou mimétiques de l'exercice – améliorent la force musculaire et la performance sportive. Certains postbiotiques fonctionnent également comme des prébiotiques qui alimentent la croissance de microbes sains et aident à restaurer un microbiome endommagé.De la recherche au podiumSi les bénéfices d'une nutrition ciblant le microbiome et les mitochondries pour la santé en général sont de plus en plus évidents, cette approche n'en est encore qu'à ses débuts dans les sports d'endurance.Pour les sportifs occasionnels et les guerriers de la fin de semaine, les stratégies de nutrition globale qui soutiennent le microbiome et les mitochondries pourraient s'avérer très utiles. Ces stratégies ont le potentiel d'améliorer les performances, de protéger contre les effets indésirables de l'entraînement et de prévenir les maladies chroniques telles que l'obésité, le cancer et la maladie d'Alzheimer.Pour les athlètes d'élite qui cherchent à améliorer, ne serait-ce que légèrement, un régime d'entraînement déjà bien réglé, de nouvelles recherches sur l'influence du microbiome intestinal sur les performances pourraient s'avérer inestimables. Dans un domaine hautement compétitif où rien ne peut être laissé de côté – ou au hasard – de telles interventions pourraient bien être le facteur décisif entre une victoire ou une défaite.Cet article est publié dans The Conversation sous une licence Creative Commons.Christopher Damman est professeur agrégé de gastro-entérologie à la faculté de médecine de l'Université de Washington.

Le microbiome intestinal, un avantage de taille pour les athlètes

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