VIH : Le mystère de la mort des lymphocytes T CD4 résolu?

Chez les personnes vivant avec le VIH, les cellules lymphocytes T CD4, responsables du déclenchement de la réponse immunitaire, sont prédisposées à l’apoptose, soit leur autodestruction. Mais le mécanisme sous-jacent en action était encore récemment mal compris. Une équipe de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) a découvert que ces cellules ont une expression plus élevée du récepteur TLR7 et du facteur de transcription IRF5, qui constituent une «empreinte» favorisant la mort cellulaire. Dans un milieu inflammatoire chronique, les tissus endommagés libèrent des motifs moléculaires associés aux dégâts, comme des composants de cellules. L’équipe a observé que les récepteurs TLR7 les détectent, puis que IRF5 déclenche un signal menant à la mort de la cellule. Ces résultats, publiés dans JCI Insight, sont basés sur 43 adultes âgés de 27 à 56 ans, et pourraient à l’avenir être testés sur des infections telles que la COVID-19, la leishmaniose viscérale, ou celles pouvant causer des chocs septiques. Réponse immunitaire affaiblie Les cellules mémoire, comme les lymphocytes T CD4, permettent une meilleure résistance aux pathogènes après une première rencontre. «Elles sont extrêmement importantes [...] Si vous tuez cette mémoire, la personne devient plus fragile aux autres infections», souligne Simona Stäger, professeure en immunologie des maladies infectieuses à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS). Leur mort constitue donc un enjeu majeur, surtout pour les 20% de patients chez qui les traitements antirétroviraux ne fonctionnent pas, et qui continuent de voir leur taux de CD4 dans le sang diminuer. Même chez les personnes sous traitement, une inflammation résiduelle persiste, notamment dans le tube digestif. «Elles peuvent causer des dommages aux tissus, et les cellules T DC4 sont capables de les sentir», explique Simona Stäger. Les inflammations résiduelles peuvent également rendre les co-infections plus risquées pour les patients. «Ils doivent être plus prudents», renchérit Liseth Carmona, doctorante à l’INRS. C’est pourquoi «il faut comprendre comment ces patients ont besoin d’être traités et quelle est la cible potentielle pour le prochain remède ou l’amélioration des traitements», estime-t-elle. Espoirs incertains À travers ses travaux, l’équipe de recherche a démontré que des peptides inhibiteurs d’IRF-5 sont capables de bloquer la transcription de ce facteur. «Il s’agit d’une séquence qui peut reconnaître la protéine et prévenir son activation», indique Liseth Carmona. «Nous pensons que les peptides pourraient être importants, par exemple chez les patients avec des co-infections, pour améliorer les résultats du traitement», ajoute-t-elle. Des peptides ont déjà été testés avec succès contre des maladies auto-immunes, telles que le lupus. Les expériences de l’équipe de Simona Stäger ont cependant été réalisées en laboratoire, ne permettant pas d’observer les réactions du corps humain. Les peptides ont également bloqué le facteur de transcription IRF5 dans sa totalité, et ce dans toutes les cellules. «Nous devons trouver une façon de ne cibler que les cellules T CD4 spécifiquement, sans affecter d’autres cellules et leurs fonctions», admet Liseth Carmona. «Il est trop tôt pour dire comment nous pourrions l’utiliser [...] Des expériences ultérieures sont nécessaires pour vraiment comprendre l’impact qu’il pourrait avoir sur les autres cellules», reconnaît Simona Stäger. Trouver les peptides inhibiteurs de IRF5 adaptés aux cellules T CD4 est un autre défi car ce facteur de transcription possède 5 différentes isoformes qui varient fonction de la génétique de l’individu, d’après Simona Stäger. Son équipe a donc essayé différents types de peptides pour voir lequel fonctionnerait le mieux. «Il y a toujours de nombreuses variantes inconnues que nous devons d’abord découvrir avant de concevoir une thérapie», résume-t-elle. L’équipe de recherche espère continuer ses recherches, notamment pour enquêter sur les possibles bénéfices des peptides chez les patients pour lesquels les traitements antirétroviraux demeurent inefficaces.

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