Une nouvelle faculté de médecine et des sciences de la santé à l’UQAM?

Le nouveau recteur de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Stéphane Pallage, souhaite ouvrir une nouvelle faculté des sciences de la santé avec un volet pour la formation en médecine, un projet d’envergure qu’il estime possible de réaliser dans cinq ans. Ce serait la première fois en 60 ans qu’une nouvelle faculté de médecine verrait le jour au Québec. Cette faculté s’ajouterait à celles de l’Université McGill, de l’Université de Montréal, de l’Université Laval et de l’Université de Sherbrooke. L’idée de Stéphane Pallage serait de rassembler les départements des sciences de la santé et du travail social, déjà existants à l’UQAM, en y greffant une faculté de médecine et en créant un pôle de recherche avec les autres universités du réseau de l'Université du Québec. «L’UQAM est déjà extrêmement forte dans les domaines de la santé et des services sociaux. On a plus de 200 professeurs qui travaillent dans ces thématiques, affirme le recteur. C’est clair qu’on pourrait déjà construire une faculté des sciences de la santé avec ce qu’on a aujourd'hui, mais je pense qu’on doit aller plus loin parce que la santé au Québec est un enjeu national et il y a des besoins vraiment très importants.» À lire aussi: Études en santé: des «passerelles» pour devenir médecin ou pharmacien? Le recteur voit dans ce projet l’opportunité de bâtir une faculté des sciences de la santé et de la médecine qui serait basée à l'UQAM, mais qui pourrait s’étendre à l’ensemble du territoire québécois grâce au réseau des dix universités du Québec. «On formerait des gens à Rimouski autant qu’à Montréal et des stages pourraient se faire autant en région qu’ici. Je pense qu’il y a une vraie opportunité pour l’UQAM, mais aussi surtout pour le Québec.» Les professionnels de la santé voient d’un œil plutôt favorable ce projet, selon le recteur. Le Dr Sylvain Dion, premier vice-président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), porte un regard différent sur les composantes de cette annonce. «L’idée pour le réseau de l'Université du Québec de regrouper l'ensemble des chercheurs est très intéressante, dit-il. Cela permettrait de créer une sorte de matière grise pour améliorer les soins globalement au Québec et serait bénéfique pour l’ensemble de la démarche scientifique notamment pour l'activité en première ligne, ce qui nous intéresse nous, les médecins de famille.» Le Dr Dion se soucie cependant de la création d’une toute nouvelle faculté de médecine, qui, selon lui, mobiliserait beaucoup de ressources dont le monde de la santé manque déjà. Il mentionne notamment le délai important pour former des médecins, le manque de professeurs et les augmentations de cohortes qui forcent déjà les universités à revoir leur modèle pédagogique. Selon lui, l’UQAM devra aussi faire face au manque de places dans les milieux de stages, essentiels pour les étudiants en médecine et en sciences de la santé. Stéphane Pallage affirme que les futurs étudiants en médecine auront la possibilité de compléter leurs stages au sein du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM), du Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine et d’autres hôpitaux montréalais ainsi que les 20 cliniques universitaires affiliées au réseau de l’Université du Québec. Une difficulté se profile toutefois, car le CHUM et le CHU Sainte-Justine sont déjà affiliés à l'UdeM. Pour Stéphane Pallage, qui veut axer une complémentarité avec les autres universités québécoises et créer un projet qui soit «fédérateur», cela ne devrait pas poser problème. «On a un bon historique de collaboration avec l’UdeM et on est déjà très présents au CHUM, affirme le recteur de l’UQAM, en poste depuis le mois d’avril. On va essayer de travailler sans se marcher sur les pieds, je pense qu’on peut le faire.» À lire aussi: Formation des médecins par compétences: une analyse apporte de l’eau au moulin de la FMRQ Pour le Dr. Dion, les milieux de stages sont déjà fortement sollicités par l’UdeM, ce qui pourrait mener à une compétition entre les universités. Il soulève d’ailleurs le fait que la récente augmentation du nombre d’étudiants en médecine dans les quatre autres universités leur donnent déjà du fil à retordre lorsqu’il s’agit de leur trouver des stages. «Les milieux de stage sont un vrai enjeu et ils en ont déjà plein leurs bottes à Montréal pour les coordonner, souligne le Dr Dion. Quand j'entends ce que mes collègues me disent de l'état de l'éducation au Québec, je ne pense pas que c’est la panacée d’ouvrir une nouvelle faculté de médecine.» «Il y a de la place pour développer des partenariats plutôt que de créer une nouvelle faculté de médecine, d’avoir un autre milieu qui s’implique pour former davantage de professionnels», estime le premier vice-président de la FMOQ. Stéphane Pallage veut maintenant rencontrer le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, afin de discuter du projet. Le recteur a déjà rencontré d’autres ministres qu’il dit «intéressés». Quant au recrutement et à la coordination du corps professoral et du personnel administratif pour la nouvelle faculté, le nouveau recteur se dit optimiste et explique que l’UQAM construira le projet petit à petit en se concentrant seulement sur un certain nombre de spécialités dans lesquelles l’université a déjà des forces importantes. Un optimisme et une confiance qui viennent du fait, explique-t-il, qu'il a déjà mené un tel projet à l'Université du Luxembourg lorsqu’il y était recteur. Dans cette université européenne, le programme de médecine s'arrête toutefois au niveau du baccalauréat et les étudiants doivent ensuite poursuivre leurs études en France, en Belgique ou en Allemagne. «C'était le premier programme de médecine au pays, ça a très bien fonctionné et le Luxembourg a maintenant l’équivalent d’une faculté de médecine et de sciences infirmières également», souligne-t-il. Malgré quelques embûches devant lui, Stéphane Pallage est convaincu de pouvoir mener à terme ce projet. «C’est un projet qui n’a pas été entrepris depuis 60 ans et je pense qu’il est temps que les universités publiques du Québec se lancent dans la formation médicale, dit-il. Pour le moment, les formations sont données par quatre très grandes universités qui ont de très bons programmes, mais les besoins dépassent grandement leurs capacités de formation. Il faut que l’UQAM soit là.»

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