Un nouveau sondage montre que les Canadiens pensent que le système de santé est «indéniablement en déclin»

Un nouveau coup de sonde révèle une augmentation considérable du pourcentage de Canadiens qui estiment que les soins de santé se sont détériorés au pays au cours de la dernière décennie. En 2015, 42% des répondants étaient de cet avis, mais ce nombre est passé à 68% cette année, selon les résultats d’un sondage présentés lors de l’ouverture du Sommet de la santé de l’Association médicale canadienne, à Ottawa, le 17 août. «Selon les Canadiens, le système de santé est indéniablement en déclin», a affirmé la présidente de l’Institut Angus Reid, Shachi Kurl, en présentant ces chiffres. Le sondage en ligne réalisé du 1er au 8 août auprès de 5 010 adultes canadiens membres du Forum Angus Reid est le fruit d’un partenariat entre l’AMC et l’Institut Angus Reid. Voici d’autres résultats : 60% des Canadiens interrogés croient que les 46,2 milliards de dollars débloqués plus tôt cette année par Ottawa amélioreront le système de soins de santé, mais 51% d’entre eux estiment que les gains seront au mieux marginaux. 62% souhaitent qu’il soit plus facile pour les médecins étrangers d’obtenir le droit d’exercer au Canada afin d’augmenter le nombre de praticiens au pays. Lorsqu’on leur demande de classer par ordre de priorité les principales mesures à prendre, deux personnes sur cinq (43%) considèrent qu’il est prioritaire de veiller à ce que les services d’urgence disposent d’un personnel suffisant pour éviter les fermetures. Mais réduire la pression sur la santé mentale des travailleurs de la santé figure également en bonne place parmi les correctifs à apporter au système (31%). «Les Canadiens sont maintenant conscients que le système de santé ne va pas bien», a observé la Dre Kathleen Ross, qui vient d’entamer son mandat de présidente de l’AMC, au cours de la séance plénière d’ouverture. «Je pense que cette année, compte tenu de la structure des accords sur la santé, nous n’avons jamais eu autant de contraintes», a pour sa part indiqué la Dre Alika Lafontaine, ancienne présidente de l’AMC. «Pour avoir accès au financement du Transfert canadien en matière de santé, (les provinces) ont dû signer un accord de partage des données — il y a donc maintenant un niveau plancher pour le partage des données dans le pays. Pour accéder au financement de l’accord conclu dans le cadre de l’accord bilatéral, il fallait également reconnaître les titres de compétences». La Dre Lafontaine soutient que les changements que nous observons en matière de réglementation - raison pour laquelle l’Ontario a adopté la Loi sur le droit aux soins et que des progrès ont été réalisés pour mettre en ligne le Registre de l’Atlantique cette année — sont le fruit de mesures fédérales. La Dre Katharine Smart, une autre ancienne présidente de l’AMC qui faisait également partie du groupe d’experts, est d’accord avec ce point de vue. «Ce qui est encourageant, c’est que nous avons vu le gouvernement fédéral définir certains des domaines prioritaires sur lesquels se concentrer. Et je suis d’accord pour dire que cette fois-ci, nous constatons que des conditions sont imposées, qu’il y a une certaine obligation de rendre des comptes, ce qui a été un énorme problème dans le passé.» La structure de financement est différente cette fois-ci, a insisté la Dre Lafontaine. «Nous sommes au début d’un cycle», a-t-elle convenu. Le financement de 2004 a conduit à la création de l’Alliance sur les temps d’attente en 2007. «Nous nous souvenons tous que les choses semblaient s’améliorer entre 2008 et 2012, puis tout le monde a crié victoire et a cessé de travailler ensemble. Si nous évitons cela dans le nouveau cycle, je pense que nous avons une réelle chance de changer les soins de santé», a-t-elle par ailleurs observé. Une crise profonde Néanmoins, l’ampleur de la crise ne doit pas être sous-estimée. L’enquête menée auprès des Canadiens a également montré qu’une majorité d’entre eux pensent que le système de santé est confronté à des défis que l’argent ne peut pas résoudre (60%). Lire aussi: Le retour du gestionnaire intermédiaire «Si nous sommes dans cette situation, c’est à cause du statu quo. Ce n’est pas à cause des événements mondiaux ni d’autres facteurs», a expliqué la Dre Lafontaine. «Nous privilégions la macroéconomie dans le domaine de la santé et nous ne tenons pas compte de certaines choses. Il est tellement surréaliste d’entendre parler d’une crise des médecins au moment même où l’on réduit les salaires des omnipraticiens. L’offre et la demande n’ont pas de sens dans ce contexte.» À l’heure actuelle, les provinces et les territoires ont mis en ligne sur le site de la Confédération leurs plans d’action, leurs feuilles de route et leurs stratégies pour améliorer les soins de santé. Récemment, l’AMC a également proposé d’adopter 13 indicateurs et objectifs pour améliorer la responsabilité dans le système de santé. Soins privés Interrogée sur les soins privés, la présidente d’Angus Reid a signalé qu’elle voyait l’attitude des Canadiens évoluer à cet égard. «Nous étudions cette question depuis plusieurs années et nous commençons à voir un changement : les gens passent d’une position de pureté totale dans la défense et le maintien du système public à ce que j’appelle de la curiosité pour les soins privés», a-t-elle indiqué. Lire aussi: Partout dans le monde, la résilience des systèmes de santé affaiblie par les réformes néolibérales «Les gens se situent à trois endroits différents du spectre: il y a les partisans des soins privés qui se sont battus devant les tribunaux en prétendant qu’il fallait aller dans cette direction. Il y a aussi les puristes de l’assurance publique qui disent “pas question, pas question, pas question, pas question, jamais”. Mais le groupe intermédiaire — celui qui est ouvert et envisage des soins privés — commence à se développer et nous le constatons dans les vagues successives de sondages que nous réalisons.» La Dre Smart, dont le mandat de présidente de l’AMC s’est déroulé au plus profond de la crise du COVID-19, a constaté que les médecins sont aujourd’hui plus impliqués dans les questions globales: «Pour moi, l’un des aspects les plus intéressants de la pandémie a été l’évolution du rôle du médecin. Vous savez, nous pensons souvent à notre relation avec la personne en face de nous, mais pendant la pandémie, nous avons dû nous réimaginer en tant que professionnels qui devaient vraiment penser à nos communautés et à notre pays, comme à nos patients.»

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