Transfert de ressources des CLSC vers les GMF: «Des bénéfices pour les médecins de GMF et la population»

Le transfert de ressources professionnelles des CLSC vers des GMF, destiné à favoriser l’interdisciplinarité dans les groupes de médecine de famille, n’inquiète pas outre-mesure le président de l’Association des médecins de CLSC du Québec, le Dr Sylvain Dion. Il y voit d'abord des bénéfices pour la population et les médecins en GMF. Depuis que les CLSC existent, l’arrimage avec les cabinets a toujours été difficile. ©D. MéthotLe 3 mars dernier, Québec a confirmé que des professionnels de CLSC, principalement des travailleurs sociaux, mais aussi des nutritionnistes et des kinésiologues, seraient transférés dans des GMF pour se joindre aux équipes interdisciplinaires en place. Ces transferts ont déjà commencé. On ignore combien de professionnels feront le saut, mais il est prévu qu’en fonction du nombre de patients, 2 à 2,5 travailleurs sociaux et 2,5 professionnels de leur choix soient alloués par GMF.Dans une entrevue à Radio-Canada, le ministre Gaétan Barrette a affirmé que le concept initial des CLSC, qui était d’offrir des soins interdisciplinaires, a été un échec. Plutôt que de forcer les médecins de GMF à aller pratiquer en CLSC pour remédier à la situation, il a opté pour le mouvement inverse: il déplace ainsi des professionnels de CLSC vers des GMF. Le médecin qui voudra diriger un patient vers une ressource n’aura donc plus besoin de l’envoyer dans un CLSC.Résistance et problème de financementToutefois, selon le président de l’Association des médecins de CLSC, le Dr Sylvain Dion, ces transferts se heurtent à une certaine résistance.«D’une part, il faut que les GMF soient capables d’accueillir physiquement ces nouveaux professionnels et de leur fournir des bureaux, a-t-il commenté à Professionsante.ca. D’autre part, les CLSC sont réticents à voir partir ces ressources qui seront dédiées à une clientèle peu circonscrite, plus large, que celle desservie par les CLSC.»Le financement risque aussi de poser problème. Les salaires des infirmières et des pharmaciens sont assumés par le ministère de la Santé, mais Québec n’a pas prévu d’argent neuf pour cette opération, et la rémunération des autres professionnels déplacés vers les GMF devra être assurée à même les budgets actuels des CISSS et des CIUSSS.Des bénéfices pour la populationSelon le Dr Dion, ce transfert de professionnels risque de bousculer l'organisation des CLSC, mais en contrepartie, il aura des retombées positives.«Rapprocher ces ressources vers les médecins de première ligne en GMF va amener des bénéfices intéressants en termes de collaboration interprofessionnelle, de facilités de travail (finis les appels téléphoniques au travailleur social du CLSC) et de suivi de clientèles plus lourdes, soutient-il. Comme médecins, nous sommes parfois débordés par ces clientèles. Pouvoir compter sur un intervenant qui sera à nos côtés dans la clinique sera très aidant.»Pas de migration des médecins de CLSCPrès de 1 600 médecins de famille pratiquent en CLSC, dont 950 font partie de l’Association des médecins de CLSC. Néanmoins, le Dr Dion ne s’attend pas à ce que la décision du ministère de la Santé entraîne une migration de ces médecins vers les GMF.«C’est sûr qu’on peut avoir une crainte de perdre des ressources, mais beaucoup de médecins de CLSC travaillent déjà en GMF, rappelle-t-il. Il y a déjà un certain jeu de vases communicants. On connaîtra les véritables impacts de ces déménagements en fonction du nombre de professionnels qui devront être transférés.»Il souligne aussi que les CLSC vont continuer à desservir des patients qui ne sont pas inscrits dans des GMF. Même privés des ressources qui partiront pour les GMF, les CLSC devront être capables de continuer à répondre aux besoins de cette clientèle, dit-il. Même s’il a critiqué le bilan des CLSC, le ministre Barrette reconnaît leur expertise dans la santé mentale, la prévention et le communautaire, et les soins à domicile.«Le plus gros problème que vivent les médecins de CLSC n’est pas tant le soutien des autres professionnels, travailleurs sociaux, infirmières, nutritionnistes ou autres, que le manque de soutien administratif et de secrétariat, ajoute le Dr Dion. C’est la principale raison pour laquelle les médecins quittent les CLSC.»La plus grande menaceLe Dr Dion ne voit pas dans le transfert des ressources vers les GMF un premier geste de démantèlement des CLSC, ni un échec de cette formule, comme l’a prétendu le ministre.«Échec est peut-être un bien grand mot. Ce qui a été très difficile à développer depuis que les CLSC existent, c’est un meilleur arrimage avec les cabinets, et c’est toujours le cas. Va-t-on assister à un démantèlement? Ce qui les menace le plus, ce sont les nombreuses restructurations administratives. Dans les années 80, ils formaient des entités autonomes et pouvaient prendre des décisions en fonction de leur milieu. Maintenant, ils sont regroupés dans des méga-établissements, dont la mission est régionale. On va à l’inverse d’une décentralisation pour répondre aux besoins locaux de la population.»

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