Sondage: les médecins épuisés et prêts à réduire leurs heures de travail

«Ce nouveau sondage doit être interprété comme un véritable cri d’alarme pour améliorer la santé et les bien-être des médecins», lance le porte-parole de l’AMC, le Dr Abdo Shabah. En comparaison, une enquête similaire réalisée en 2017 avait établi ce niveau d'épuisement à 30%. Depuis le début de la pandémie, l’urgentologue à l’Hôpital du Haut-Richelieu à Saint-Jean-sur-Richelieu voit ses collègues épuisés et exténués dans les salles d’urgence. Il n’est donc pas surpris par ce haut taux d’épuisement professionnel dévoilé dans le sondage réalisé en novembre dernier. «Nous avons passé deux ans où les médecins étaient constamment au front. Il y a eu énormément de stress à cause de la pandémie. Cela a eu un impact important sur la détresse psychologique», dit-il. Selon les données du sondage pancanadien, 59% des répondants ont avoué que leur santé mentale s'était dégradée depuis le début de la pandémie, à cause de l'augmentation de la charge de travail et de l'absence d'équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle. De plus, leur bien-être émotionnel et psychologique ont diminué par rapport aux niveaux mesurés avant la crise sanitaire. Des heures de travail réduites Conséquemment, 46% des répondants au sondage envisagent de réduire leurs heures de travail clinique au cours des 24 prochains mois. Une situation extrêmement préoccupante dans un contexte où il y a déjà des problèmes d’accès aux soins de santé. «Si au Québec, la moitié des 20 000 médecins pensaient réduire leur travail d’une journée par semaine, c’est presque l’équivalent de 2000 médecins que l’on perdrait. C’est une perte énorme! Le système de santé ne peut pas survivre avec une telle réduction», affirme le Dr Abdo Shabah, qui rappelle que 800 000 Québécois n’ont toujours pas accès à un médecin de famille. L’urgentologue rencontre chaque jour des patients affectés par ce manque d’accès aux soins. Par exemple, certains n’ont pas reçu de diagnostic de cancer rapidement, alors que d’autres ont des problèmes de santé à cause d’un manque de continuité dans les soins. Le pire est-il à venir? Dans un contexte où une sixième vague est envisagée au Québec, le porte-parole de l’AMC craint que la santé des médecins n'empire. «À chaque vague, les services de santé ont été plus utilisés. On va demander à des gens épuisés de travailler davantage pour contrer la pandémie, en plus de leur demander de faire du rattrapage». Selon lui, le gouvernement québécois doit agir pour améliorer la santé et le bien-être des médecins, à commencer par diminuer la paperasse qui pèse lourd sur les médecins. «Ce n’est pas l’injection d’argent ni les augmentations salariales qui vont faire la différence. Il faut améliorer les outils technologiques pour réduire l’important fardeau administratif. Les médecins passent encore trop de temps à utiliser les télécopieurs, entre autres», indique le Dr Shabah, ajoutant que le gouvernement doit également surveiller l’épuisement professionnel chez les médecins. Une réalité semblable partout Par ailleurs, ce sondage pancanadien ne distingue pas les données par province, mais l’AMC assure que la situation est similaire partout au Canada. Par contre, l’épuisement professionnel et la baisse des heures de travail affectent les régions différemment. Par exemple, l’Outaouais, qui déplore un manque significatif de médecins de famille et de spécialistes, est plus particulièrement touchée par la fatigue des professionnels de la santé. Le sondage canadien a été déployé pendant cinq semaines et a reçu plus de 4000 réponses de médecins et d'apprenants en médecine. Un rapport exhaustif sera publié par l'Association médicale canadienne plus tard cette année.

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