Règlement sur l’abolition des frais accessoires: les pharmaciens écopent aussi

Jean Bourcier, vice-président exécutif et directeur général de l’AQPPComme les médecins, les pharmaciens sont furieux de ne pas avoir été entendus par le ministre de la Santé avant la publication finale du règlement sur l’abolition des frais accessoires. Il faut dire que selon l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP), les orientations du ministère de la Santé et des Services sociaux qui accompagnent le règlement confirmant l’abolition des frais accessoires sonnent le glas de plusieurs services offerts jusqu’à présent en pharmacie.En effet, la vaccination des enfants ou celle qui a lieu dans le cadre du Programme québécois d’immunisation (ex.: vaccins contre la grippe pour les personnes atteintes de certaines maladies chroniques) ne pourra plus être facturée aux patients.Les pharmaciens ne pourront plus non plus facturer les services d'une infirmière pour les prélèvements effectués en pharmacie ou encore faire payer les patients pour les tests de suivi de l'anticoagulothérapie, incluant les bandelettes utilisées pour ceux-ci.Si l’AQPP ne peut chiffrer l’impact des deux premières interdictions, elle sait que quelque 135 000 tests IRN (International Normalized Ratio) sont effectués dans les pharmacies québécoises chaque année.Un règlement qui contredit l’entente de 2015Le vice-président et directeur général de l’AQPP, Jean Bourcier, avait beau savoir que le règlement allait prendre effet au mois de janvier, il a néanmoins été surpris «puisque l’entente entre les pharmaciens et le MSSS prévoyait que les frais en question étaient hors entente, donc pouvaient être facturés par les pharmaciens».Il n’était pas prévu non plus, selon lui, que les pharmaciens ne puissent plus facturer les services des infirmières quand elles font des prélèvements biologiques dans le cadre de services pharmaceutiques. «Un service assez fréquent qui devra maintenant se faire ailleurs que dans les pharmacies, soit dans des laboratoires privés, soit dans le réseau public», affirme Jean Bourcier. L’AQPP ne collige pas le nombre de prélèvements effectués, mais son vice-président suspecte que l’on peut parler «de dizaine de milliers».Or, les pharmaciens ne comptent pas absorber les pertes que le nouveau règlement engendrera.Jean Bourcier rappelle, à titre d’exemple, que dans le cadre du suivi de l’anticoagulothérapie, les pharmaciens ont négocié un honoraire mensuel de 16 $. Or, selon que le patient est stabilisé ou pas, un pharmacien devra parfois lui faire passer des tests jusqu’à quatre fois par mois. Or, «le coût d’un test, sans même parler du temps pour faire le test, est pas loin de 7 $. Donc à partir du moment où le pharmacien devra faire deux tests ou trois tests, cela deviendra totalement non rentable pour le pharmacien.» Les pharmaciens qui veulent continuer de faire le suivi de l’anticoagulothérapie enverront donc leurs clients faire les tests en laboratoire privé ou dans le réseau public.Les patients seront perdantsEn fin de compte, cela sera au détriment du patient qui devra prendre des rendez-vous avec plusieurs professionnels de la santé en plus de payer de sa poche. Dans le privé, il lui faudra payer pour le test. Dans le public, «en tout cas dans la région montréalaise, si le patient doit aller en milieu hospitalier pour faire son test, cela va lui coûter le stationnement, ce qui est au moins aussi cher que le test réalisé actuellement en pharmacie et facturé par les pharmaciens, sans parler du déplacement, du temps d’attente, de la perte de productivité et des désagréments causés au patient».Selon lui, le réseau public a abandonné ces tests pour les envoyer en pharmacie parce qu’il n’était plus capable de les prendre en charge. Les y renvoyer avec l’idée d’assurer une accessibilité optimale pour les patients est donc «totalement inconséquent».Jean Bourcier espère encore convaincre le ministre Barrette que cette situation est perdante pour le patient en premier lieu, mais aussi pour le système de santé et les pharmaciens, et que «des solutions peuvent être trouvées pour éviter que la situation se mette en place d’ici le 26 janvier prochain».Le ministre de la Santé a répondu à l'AQPP via l'émission de Paul Arcand vendredi matin qu'en fait si les tests nécessaires au suivi de l’anticoagulothérapie se retrouvent dans les documents fournis à la population par le ministère, c'est parce qu'ils seront remboursés par la RAMQ dès février prochain. Selon les explications du ministre, les pharmaciens devraient aussi pouvoir continuer de se faire payer pour la vaccination en pharmacie. Le ministre a aussi reproché à l'AQPP de ne pas avoir vérifié avec le ministère de quoi il retournait exactement. Jean Bourcier, lui, a précisé par voie de communiqué que l'AQPP attend toujours une réponse à sa demande de rencontre avec le MSSS, suite à la publication du règlement. Une affaire à suivre donc!

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