Quand les soins de santé tournent mal: l'heure est à la transparence en matière de sécurité des patients

La crise de la COVID-19 a à la fois divisé et galvanisé les Canadiens en matière de soins de santé. Si les trois dernières années ont posé de nouveaux défis aux systèmes de soins de santé du pays, la pandémie a également exacerbé les défis existants, notamment les niveaux élevés d'erreurs et de mauvais traitements documentés dans les systèmes de santé canadiens. Selon un rapport de l'Institut canadien pour la sécurité des patients (2019), le Canada était déjà confronté à une crise de santé publique avant la pandémie: celle de la sécurité des patients. Comme le détaille le rapport, les incidents liés à la sécurité des patients sont la troisième cause de décès au Canada, après le cancer et les maladies cardiaques. Peu d'études recensent les données nationales sur le sujet, mais un rapport de 2017 a révélé que les incidents liés à la sécurité des patients ont entraîné un peu moins de 28 000 décès. De nombreux Canadiens qui ont été victimes de ces erreurs ont partagé leur expérience avec les médias dans le but de sensibiliser et d'exiger des changements. Des crises convergentes L'impact de la pandémie de COVID-19 a créé une intersection entre deux crises. D'une part, la crise préexistante de la sécurité des patients et, d'autre part, les soins de santé dans leur ensemble sont maintenant à un point de rupture après trois ans de pandémie, selon les travailleurs de la santé. Le Dr Darren Markland, médecin d'Edmonton, par exemple, a récemment fermé son cabinet de spécialiste des reins après avoir commis quelques «profondes erreurs». Dans une entrevue accordée à Global News, il a expliqué qu'il ne pouvait plus travailler au rythme actuel. Il n'est pas le seul à avoir pris cette décision. Dans tout le pays, des vagues de démissions ont eu lieu dans le secteur des soins de santé, laissant certaines régions aux prises avec un système «dégradant, de moins en moins sûr et souvent sans dignité». Si la perturbation soudaine de la prestation des soins de santé par la COVID-19 a été un choc pour de nombreux professionnels de la santé et pour le public, son impact est particulièrement lourd pour un système de soins de santé déjà surchargé et manquant de ressources. La pandémie continue d'épuiser l'endurance des praticiens et d'éroder le bien-être des patients, contribuant ainsi à un courant sous-estimé, mais croissant, d'échecs de soins. En outre, comme l'indique clairement le rapport 2020 In Plain Sight de la Colombie-Britannique, les patients autochtones, en particulier les femmes autochtones, sont souvent en première ligne de cette crise parce que les défaillances du système se mêlent au racisme et à la discrimination. Comme l'a révélé le cas très médiatisé de la mort de Joyce Echaquan dans un hôpital québécois, l'intersection des erreurs de soins de santé et du racisme est une réalité dans tout le pays. L'occasion de changer Mais la crise est aussi une occasion de changer. Les défis identifiés ci-dessus ont deux éléments en commun: un manque de transparence et l'érosion de la confiance. La déconstruction de la culture du secret qui empêche les Canadiens de connaître les réalités de leur système de soins de santé doit être l’un des éléments centraux d'un changement significatif pour rétablir et maintenir la confiance. Pourquoi y a-t-il tant de secrets en santé? Au Canada, la législation actuelle, comme l'article 51 de l'Evidence Act (1996) de la Colombie-Britannique, étend le privilège juridique aux examens de la qualité et de la sécurité, ce qui entraîne des préjudices supplémentaires pour de nombreux patients, familles et prestataires de soins de santé. L'isolement, le silence et l'exclusion intentionnels après des incidents ayant causé un préjudice minent la confiance, empêchent l'apprentissage et entravent les possibilités de guérison et de rétablissement pour toutes les personnes concernées. Bien que les questions de responsabilité concernant la crise de la COVID-19 soient quelque peu différentes, l'impact en termes de confiance est similaire. Les dirigeants du Canada et du monde entier ont politisé la pandémie de diverses manières, souvent en bafouant eux-mêmes les règles. Transparence et imputabilité Le manque de transparence et d’imputabilité doit être résolu. Les patients, les familles, les communautés et les prestataires de soins de santé à tous les niveaux doivent disposer d'un moyen fiable de connaître l'ampleur des défis auxquels nous sommes confrontés, qu'il s'agisse de la récente crise pandémique, de la crise de la sécurité des patients qui dure depuis des décennies ou de l'impact continu du racisme et de la discrimination dans les soins de santé à travers le pays. Une comptabilité simple et directe, tant des chiffres que des histoires, doit être largement disponible si l'on veut créer une dynamique de changement et rétablir la confiance dans le système de santé dans son ensemble. Accroître la transparence est un pas en avant essentiel. Cependant, il existe également d'autres moyens de reconstruire les relations et la confiance dans les soins de santé par le biais de processus qui favorisent la guérison de toutes les personnes concernées. Par exemple, la Nouvelle-Zélande a connu un succès considérable dans la mise en œuvre de processus de justice réparatrice à la suite de préjudices causés par les soins de santé. Ce type de processus exige un changement de mentalité: il ne s'agit plus de se demander «Que s'est-il passé et qui est à blâmer?», mais plutôt «Qui a été lésé et quels sont ses besoins?». Profitons de ce moment de crise pour aller de l'avant, de manière à favoriser des relations de soins équitables, de la sollicitude et de la dignité. Nous pouvons aller de l'avant d'une façon qui cultive la confiance dans nos systèmes de santé bien-aimés, mais assiégés. Les pratiques de justice réparatrice offrent un moyen pour y parvenir, ce qui, nous l'espérons, pourra servir de base à l'action. Pou hihiri, Pou o te aroha (Guérir et apprendre du préjudice) est un projet de justice réparatrice en Nouvelle-Zélande: Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons.

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