Poursuites civiles contre des résidents: des cas moins nombreux, mais plus sérieux

Entre 1993 et 2017, 4921 médecins résidents ont été cités dans 2951 affaires judiciaires au civil. D’année en année, le taux de poursuites visant des cliniciens en formation a baissé de 1,1% en moyenne, révèle une étude publiée dernièrement par l’Association canadienne de protection médicale (ACPM) qui a passé au crible ses archives afin de mieux cerner le niveau de risque de litige des étudiants et de mieux comprendre l’expérience qu’ils peuvent vivre lorsqu’ils sont poursuivis. Cette diminution annuelle de 1,1% est LA bonne nouvelle de cette étude, souligne son auteure principale, la Dre Lisa Calder. La directrice générale de l’ACPM n’a cependant pas de réponses précises pour expliquer le recul progressif du taux de poursuites contre des résidents. «On constate que le risque a baissé pour tout le monde [médecins résidents et médecins titulaires]», indique-t-elle en estimant que l’amélioration des soins et de leur sécurité est une des explications. «En revanche, ce que l’on ne sait pas, c’est pourquoi, et dans quelles circonstances, un patient lésé choisit d’engager une poursuite ou pourquoi il ne le fait pas.» Dans le détail, 4,1% des 45 967 résidents membres de l’ACPM entre 2008 et 2017 ont fait l’objet d’une action civile au cours de cette décennie, une période analysée de près dans l’étude afin de considérer des cas reflétant une pratique médicale plus contemporaine, en adéquation avec les programmes de formation des résidents. Dans le même temps, 2,3 % de l’ensemble des membres de l’association (au nombre de 105 000 aujourd’hui) ont été visés par une poursuite. La comparaison n’est toutefois pas «valide», prévient la Dre Calder. D’une part parce que les résidences durent de deux à cinq alors que ce taux s’applique sur une décennie pour les médecins titulaires. Et, d’autre part, parce que les uns et les autres ne sont pas exposés aux mêmes volumes de patients ni aux mêmes niveaux de risque. Si les affaires impliquant des résidents sont moins nombreuses, elles ont tendance à concerner des préjudices plus graves pour les patients, voire des décès (plus de la moitié des cas). Ce qui ressort également de l’analyse de l’ACPM, c’est qu’il existe des inquiétudes et de la confusion chez les médecins en formation quant à leur propre responsabilité médico-légale. «Souvent, les résidents pensent que si un problème survient ou si une erreur est commise, seule la responsabilité de leur superviseur sera engagée. Ils ont tort. Ils peuvent être nommés dans une poursuite et être déclarés responsables», signale la Dre Calder en ajoutant que cette perspective est une source considérable de stress. «Ce sont des expériences difficiles, qui peuvent durer des années.» De longues procédures en général L’étude montre en effet que la durée moyenne des actions civiles s’établit à 39 mois. Dans le cas d’un règlement à l’amiable, elle est de 47 mois et de 75 mois quand l’affaire se règle au tribunal. Soit de quatre à six ans, autant si ce n’est plus que la durée d’une résidence qui oscille de deux à trois ans en médecine familiale, et de quatre à cinq ans dans certains programmes de spécialité. Si l’objectif de l’étude était de caractériser les poursuites dont les résidents font l’objet, elle va également permettre à l’ACPM d’orienter ses formations dans le but d’améliorer la sécurité des soins médicaux, observe son directeur administratif chargé de l’éducation, le Dr Armand Aalamian. «L’étude met en lumière que les résidents en médecine d’urgence, en obstétrique et gynécologie, en chirurgie générale et en neurochirurgie sont plus à risque que les autres. On va pouvoir identifier des formations spécifiques plus adaptées à ces groupes-là pour renforcer la sécurité des patients», illustre l’ancien médecin de famille autrefois impliqué dans le milieu académique. «Si on connaît mieux les facteurs de risque, on peut développer des connaissances et des outils pour aider les futurs médecins à mieux gérer leurs patients», ajoute-t-il en précisant que l’ACPM propose aussi des ateliers aux médecins superviseurs. «On va pouvoir les ajuster en ce sens également.»

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