Microbiote: vers des traitements axés sur des changements alimentaires?

C’est du moins ce qu’a démontré une équipe de l’École de nutrition, du Centre NUTRISS et de l’Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels de l’Université Laval dans une nouvelle étude publiée dans la revue Microbiome. «Il y a de plus en plus d’études qui confirment le lien entre certaines maladies et le microbiote, et qui confirment également que l’alimentation peut jouer un rôle important sur le long terme, mais nous ne savons pas nécessairement son impact sur le court terme», explique Isabelle Bourdeau-Julien, première autrice de l’étude. Les chercheurs ont ainsi recruté 21 personnes en bonne santé qui ont modifié leur alimentation en alternant entre une diète méditerranéenne pendant trois jours, une diète similaire à celle du Canadien moyen pendant 13 jours, pour finalement revenir à la diète méditerranéenne les trois derniers jours. Des échantillons de sang à jeun pendant la nuit et des échantillons de selles ont été prélevés le matin de chaque changement de régime alimentaire. Les chercheurs ont remarqué que la composition du microbiote change dans les 48 premières heures suivant ces transitions alimentaires, ce qui peut induire des modifications physiologiques chez l’hôte. «Cela peut expliquer pourquoi les études qui établissent un lien entre les maladies et le microbiote ont parfois des incohérences entre elles. L’alimentation des participants pourrait avoir un biais sur ces associations faites, dépendant ce qu’ils ont mangé quelques jours avant la prise d’échantillon», suggère la chercheuse. Celle-ci ajoute que les prochaines études portant sur le lien entre le microbiote intestinal et certaines maladies pourraient envisager, par exemple, de mettre les participants sur une même alimentation de base pour éviter les facteurs confondants. Les chercheurs ont également remarqué que l’abondance de certains acides gras produits par le microbiote, à courte chaîne ou à chaîne ramifiée, réagit rapidement aux changements alimentaires. Ces molécules interviennent dans des fonctions métaboliques importantes, notamment le métabolisme énergétique, la santé cardiovasculaire et l’inflammation. Vers une nutrition de précision Les chercheurs ont finalement également noté que plus le microbiote est diversifié au départ, plus il demeure résilient face aux changements dans l’alimentation. Selon Isabelle Bourdeau-Julien, ces découvertes pourraient mener à développer une nutrition de précision. «Le pouvoir de l’alimentation a un grand impact sur la santé des individus. Éventuellement, il serait peut-être possible d’adapter des plans alimentaires pour prévenir et traiter certaines maladies en fonction du microbiote de chaque patient», explique-t-elle. Comme cette étude le suggère, un patient avec une forte diversité au niveau du microbiote - et qui a une maladie associée à ce dernier - répondrait probablement moins bien à un changement d’alimentation qu’un patient avec un microbiote peu diversifié. «Cela pourrait devenir un outil afin de déterminer si les gens sont plus susceptibles de répondre à une intervention alimentaire», partage la chercheuse. Bien que la science n’y soit pas encore, cette approche thérapeutique semble de plus en plus se dessiner dans le futur, ajoute-t-elle. «Nos résultats ouvrent définitivement la voie à d’autres études possibles.»

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