Manque d’accès aux médecins de famille: non, les jeunes ne sont pas à blâmer

On entend souvent dire que les médecins formés récemment privilégient davantage l’équilibre travail-vie personnelle, sont moins motivés par leur carrière et moins susceptibles de s’investir dans une pratique familiale complète et continue que leurs aînés. Des chercheurs ont donc tenté de vérifier si les jeunes omnipraticiens travaillaient effectivement moins et étaient moins susceptibles d’offrir la même quantité de soins, en menant une étude de cohorte rétrospective sur la pratique des médecins de famille de 1997-1998 à 2017-2018. «Le manque d’accès des patients aux médecins de famille au Canada est préoccupant. (…) Nous avons cherché à établir s'il y avait un lien entre le stade de carrière ou la cohorte des médecins de famille et le volume de pratique et la continuité des soins au fil du temps», expliquent les auteurs de l’étude parue dans le Journal de l’Association médicale canadienne (JAMC). Pour ce faire, ils ont recueilli des données administratives sur les demandes de remboursement des frais de santé et la facturation des médecins en Colombie-Britannique, au Manitoba, en Ontario et en Nouvelle-Écosse. Tous les médecins inscrits auprès de leur ordre professionnel provincial comme ayant une spécialité médicale en médecine familiale et/ou qui avaient facturé l’assurance maladie provinciale pour des soins aux patients en tant que médecins de famille ont été inclus dans l’étude. Moins de contacts avec les patients Durant la période étudiée, le nombre médian de contacts avec les patients par médecin et par an a diminué dans les quatre provinces: on a ainsi facturé entre 515 (Colombie-Britannique) et 1736 contacts (Manitoba) de moins. Les chercheurs ont aussi examiné l'effet du nombre d'années en exercice sur le nombre médian de contacts avec les patients. Ils ont observé que ce dernier culminait alors que les médecins comptaient entre 27 et 29 années de pratique. Suivant les provinces, on comptait entre 2340 et 2556 contacts de plus que durant la période 0-2 ans de pratique. Les courbes en forme de U inversé ci-dessous montrent un nombre de contacts moins élevé en fin de carrière qu'en début de carrière (IC de 95%). En Ontario, les médecins de famille atteignaient un minimum contacts à 54-56 ans de pratique (-1864 ; IC à 95% -3702 à -26). Les chercheurs n'ont pas observé de différence dans les contacts facturés annuellement entre les cohortes, sauf pour celles situées aux extrêmes. Ainsi, les médecins de famille qui ont entamé la pratique à la fin des années 1940 et au début des années 1950 avaient des contacts médians avec les patients inférieurs à ceux qui ont commencé à exercer en 1991-1993 dans les trois provinces pour lesquelles des données étaient disponibles (les données du Manitoba n'étaient pas disponibles pour les cohortes plus anciennes). À l'inverse, les médecins de famille ayant commencé à exercer au milieu ou à la fin des années 2010 avaient des contacts médians avec les patients plus élevés que ceux ayant commencé à exercer en 1991-1993. Les auteurs n'ont pas constaté de déclin dans les contacts ni dans la continuité de soins chez les médecins qui ont commencé à exercer après 2008 en comparaison avec les cohortes précédentes. «Nous avons noté des changement dans la pratique médicale au fil des ans chez les médecins à tous les stades de leur carrière, pas seulement chez ceux ayant démarré la pratique récemment», résument les chercheurs. «Ces résultats sont importants pour la planification des effectifs en santé dans les soins de première ligne à travers le pays et ils suggèrent que les tensions et les blâmes intergénérationnels sont sans fondement et peuvent détourner l’attention de problèmes plus importants dans la planification des effectifs dans ces secteurs», concluent les chercheurs.

Manque d’accès aux médecins de famille: non, les jeunes ne sont pas à blâmer

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