L’inscription de patients, une légitimation et un outil d’évaluation pour les IPS

C’était une revendication de longue date de l’Association des infirmières praticiennes spécialisées du Québec (AIPSQ) qui a finalement été satisfaite par le ministre de la Santé Christian Dubé. Depuis le 15 avril, les IPS en soins de première ligne (IPSPL) peuvent inscrire à leur nom des patients enregistrés au guichet d’accès à un médecin de famille. Pour l’ex-présidente de l’AIPSQ, Christine Laliberté, et sa successeure fraîchement élue, Maude Raymond, cette mesure constitue une reconnaissance. «L’inscription, ça valorise notre rôle et ça fait ressortir la valeur ajoutée de notre travail», affirme la première.En réponse aux médecins de famille qui considèrent que cette annonce est «cosmétique», car les IPS prennent déjà en charge des patients, Christine Laliberté convient que ses pairs ont déjà des caseloads de patients dont elles assurent le suivi longitudinal en autonomie. «Mais ceux-ci restent inscrits auprès des médecins, donc on ne peut pas mesurer quel est notre réel impact sur la patientèle. Avec l’inscription, on va pouvoir évaluer le vrai travail des IPSPL et quelle prise en charge on peut offrir, notamment aux patients vulnérables», explique l’instigatrice du projet-pilote Archimède mis en place à la clinique Saint-Vallier, à Québec, où des IPS gèrent seules le sans rendez-vous en partenariat avec trois médecins. Autre avantage de l’inscription, les IPS vont avoir leur propre patientèle et ne la partageront plus avec le médecin avec qui elles collaborent, ce qui peut parfois susciter des enjeux et générer des tensions. Comme lorsqu’une IPS quitte son emploi, laissant en plan l’omnipraticien avec ses centaines de patients inscrits ou, à l’inverse, quand un médecin part avec sa patientèle dans un autre GMF ou la désinscrit, l’IPS se retrouvant alors démunie. Désormais, «si l’IPS change de milieu, ses patients vont pouvoir la suivre. C’est important aussi pour la relation de confiance, ça montre qu’on est responsables d’eux», souligne Maude Raymond.Lire aussi: Annonce ministérielle sur les IPS: des médecins de famille dubitatifsLa conseillère-cadre responsable du volet IPS au sein du CIUSSS de l’Estrie signale que cette mesure envoie aussi un message à la population: «Ça prend un professionnel de la santé pour tout le monde, selon le besoin. La prise en charge, c’est une affaire d’équipe entre les médecins, les IPS, les infirmières cliniciennes et les autres professionnels de la santé, en mettant les patients au centre des soins». Ultimement, pour ces derniers, «ça leur donne une porte d’entrée en plus au réseau de la santé».«Les IPS vont embarquer»Telle que présentée, l’inscription demeure une faculté d’abord offerte aux IPS qui travaillent dans des cliniques d’IPS et qui pourrait être étendue à leurs pairs œuvrant en GMF. «On pense que les IPS vont embarquer», assure Christine Laliberté. Des obligations seront-elles associées à la faculté d’inscrire des patients, de même que des forfaits monétaires pour leur prise en charge, comme pour les médecins? «On s’attend à une certaine équité dans le fonctionnement», indique sobrement l’ex-présidente de l’AIPSQ. «Des discussions informelles sont en cours, mais rien n’est encore établi», ajoute-t-elle, en précisant que l’AIPSQ n’est pas une organisation syndicale. «Si jamais il y a des obligations, le patient sera inscrit à mon nom, mais c’est toute une équipe qui va être mobilisée en arrière», insiste pour sa part Maude Raymond.Si les deux infirmières praticiennes estiment que la collaboration entre IPS et médecins est variable selon les milieux, elles constatent qu’elle est de plus en plus présente. «Plus on reconnaît nos compétences, plus la collaboration s’améliore», observe Christine Laliberté.«La seule limite, c’est notre champ de compétences», poursuit Maude Ramond. «Quand on arrive au bout, on peut par exemple faire des demandes au Conseil numérique pour avoir l’avis d’un médecin spécialiste». Au-delà, la nouvelle présidente de l’AIPSQ mentionne le besoin d’établir des corridors de collaboration, avec les médecins de famille, mais pas seulement. Elle voit cela comme des «sortes de tentacules» en imaginant des corridors diversifiés en fonction des expertises de chacune et chacun. «Les IPS en cardiologie, en pédiatrie, en santé mentale, en néonatalogie vont pouvoir épauler les IPSPL. On va aussi pouvoir collaborer avec les pharmaciens, les physiothérapeutes, les podiatres, etc. On peut tous travailler en complémentarité, au service des patients.»

L’inscription de patients, une légitimation et un outil d’évaluation pour les IPS

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