Les fédérations de médecins s'unissent pour améliorer l'accès aux soins

«Nos relations ne peuvent pas être définies par des tensions perpétuelles, a déclaré d’entrée de jeu le président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ), le Dr Vincent Oliva. Un moment donné, nous devons mettre ces tensions de côté. Même s’il y a des sujets sur lesquels nous ne sommes pas d’accord, il y a beaucoup plus de points sur lesquels nous convergeons», a-t-il mentionné lors de l’événement tenu dans le cadre des Journées de formation interdisciplinaire, le 19 novembre. De son côté, le président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), le Dr Louis Godin, a parlé de cette rencontre comme d’un «événement significatif». «Nous partageons les mêmes patients, les mêmes objectifs. Il y a tellement sujet sur lesquels nous devons augmenter notre collaboration, nos échanges», a-t-il souligné. Cette rencontre n’est pas anodine puisqu’elle envoie un message clair au gouvernement au moment où ce dernier vient de déposer son projet de loi 11: les deux fédérations sont prêtes à travailler ensemble pour améliorer l’accès aux soins de santé. À lire aussi: Le ministre Dubé promet un changement de ton avec les médecins de famille Ces derniers mois, les deux syndicats ont eu des discussions sur plusieurs enjeux, dont la vaccination et l’aide médicale à mourir. Mais, c’est surtout l’accès des Québécois à un médecin qui a retenu l’attention. À l’heure actuelle, il y a plus de 800 000 patients orphelins au Québec. Les deux présidents s’entendent pour dire que les solutions à court terme ne sont pas si simples qu’elles le semblent. «J’entends du monde dire: "pourquoi les médecins spécialistes n’hospitalisent pas plus, de cette façon, les omnipraticiens vont pouvoir prendre en charge plus de patients". Premièrement, les médecins de famille veulent continuer à hospitaliser les patients. Deuxièmement, les spécialistes ont déjà leurs propres listes d’attente. Il y a environ 600 000 patients en attente d’une consultation», explique le Dr Vincent Oliva. Le Dr Godin abonde dans le même sens. «Si les médecins de famille quittent les hôpitaux, il va y avoir toute une série d’effets sur d’autres professionnels». Pertinence et technologies Selon lui, les médecins doivent plutôt arrêter d’effectuer des actes qui ne sont pas nécessaires s’ils veulent avoir plus de temps pour prendre en charge plus de patients. Pour ce faire, il faut absolument sensibiliser la population à la pertinence des actes. «Il faut dire aux patients que ce qu’ils demandent, ce n’est peut-être pas la chose à faire». «Un patient qui s’est informé sur son mal de dos va parfois arriver dans le bureau du médecin et demander immédiatement un scan, renchérit le Dr Oliva. Le médecin a une pression du patient. Je crois que tout le monde a sa part de responsabilité», affirme-t-il, ajoutant que de 20 à 30% des activités médicales ne sont pas essentielles. Selon lui, les solutions technologiques sont une autre solution pour améliorer l’accès aux soins. Par exemple, le conseil numérique, un nouvel outil de communication permettant aux médecins de famille de communiquer directement avec un spécialiste, est très prometteur. «Cet outil permet d’éviter les consultations, mais aussi de donner de la rétroaction aux omnipraticiens. Implicitement, il y a un élément de formation dans cet outil», indique le président de la FMSQ. Le ministère de la Santé et des Services sociaux avance que, dans environ 40% des cas, le conseil numérique permet au patient d’éviter une consultation en personne. «C’est un outil fort intéressant puisqu’il nous permet d’aller chercher des réponses rapidement pour nos patients», a mentionné pour sa part le Dr Godin. Pas juste les médecins S’il faut des actes plus pertinents et de meilleurs outils technologiques, il faut également plus de collaboration interprofessionnelle, affirment les deux présidents. «Les gens doivent être bien conscients d’une chose: la difficulté d’accès à un médecin au Québec, que ce soit un spécialiste ou un omnipraticien, ne repose pas juste sur les épaules des médecins. Nous ne sommes pas les seuls responsables», argue le Dr Louis Godin. Dans les dernières années, les médecins ont souvent été taxés d’agir pour leur intérêt personnel et professionnel, observe-t-il. «Ce n’est pas le cas!» Une autre solution apparaît évidente aux yeux des deux fédérations: le rehaussement du nombre d’étudiants inscrits dans les facultés de médecine. Ce rehaussement est déjà enclenché, mais il s’agit d’une solution à long terme. En effet, son impact se verra dans six ans en médecine familiale et dans 8 ou 9 ans en médecine spécialisée. «Écoutez-nous!» Le Dr Godin a profité de la rencontre avec son homologue de la FMSQ pour envoyer un message au gouvernement. «Écoutez-nous! Vous écoutez les ingénieurs pour bâtir les ponts et construire les routes, mais écoutez pour ce qui est du système de santé. Si vous faites cela, nous allons nous en sortir». Ce dernier a aussi répété que ce ne sont pas «la coercition et les menaces» qui vont améliorer l’accès aux soins de santé. Rappelons que le premier ministre François Legault avait promis des sanctions pour les médecins qui ne prenaient pas en charge assez de patients, avant de revenir sur la décision. À lire aussi: Projet de loi sur l'accès aux médecins de famille: Québec renonce à l'affrontement Par ailleurs, le Dr Vincent Oliva a tenu à remercier le Dr Louis Godin pour son travail à la FMOQ. Président depuis 2007, ce dernier quittera ses fonctions le 11 décembre prochain. «Je suis heureux d’avoir pu échanger avec toi et participé au resserrement des relations entre nos deux fédérations sur nos points de convergence. Je suis aussi content de savoir que cette collaboration va se poursuivre avec ton successeur», a souligné le Dr Oliva au terme d’une discussion d’une trentaine de minutes.

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