Les effets placebo ne sont pas tous identiques

Si l'effet placebo est un effet connu dans les traitements de diverses spécialités, une étude menée en psychiatrie a révélé que le niveau de réponse varie selon les diagnostics. Une méta-analyse de 90 études a révélé que les effets bénéfiques d'un traitement par placebo étaient les plus importants chez les patients souffrant de troubles dépressifs majeurs (TDM) et de troubles anxieux généralisés (TAG), tandis que les effets étaient les plus faibles chez les patients atteints de schizophrénie. Les résultats ont été publiés par des chercheurs allemands dans la revue JAMA Psychiatry.Toutefois, d'autres facteurs dans les essais pourraient contribuer à l'amélioration de la psychopathologie, comme le fait que les troubles psychiatriques ont souvent une évolution épisodique. Ou «des facteurs contextuels, tels qu'un personnel d'étude attentif, des soins compatissants, des conversations de soutien et une psychoéducation, peuvent influencer les résultats de manière positive», écrivent les chercheurs. Ces derniers n'ont pas répondu aux demandes d'entrevue.Les auteurs notent que, techniquement, le placebo est l'agent thérapeutique le plus étudié au monde en raison de son utilisation omniprésente dans les essais contrôlés randomisés (ECR). Et parce qu'il est si couramment utilisé, il est nécessaire d'en apprendre davantage à son sujet.Bien que certaines études aient suggéré que la réponse au placebo semble différer selon les troubles, il n'y a pas eu beaucoup d'études sur le sujet en psychiatrie.Pour la métanalyse, les chercheurs ont utilisé 10 études récentes de haute qualité pour chacune des neuf pathologies psychiatriques pour lesquelles les patients se voient souvent prescrire des traitements médicamenteux: TDM, manie, TAG, schizophrénie, trouble obsessionnel-compulsif (TOC), trouble du déficit de l'attention/hyperactivité (TDAH), trouble panique, trouble de stress post-traumatique (TSPT) et phobie sociale. Cela représente un total de 90 études, regroupant 9985 patients traités par placebo. Parmi ces derniers, 1598 participants souffraient de TDM, 967 de manie, 888 de schizophrénie, 803 de TOC, 1189 de TDAH, 1457 de TAG, 1 180 de phobie sociale, 1248 de trouble panique et 655 de TSPT. La durée des études était variable, allant de trois semaines pour la manie à 12 semaines pour le TOC, la phobie sociale et le TAG – une période connue pour englober les effets placebo les plus forts.À lire aussi: À tout âge, l’effet placebo est important dans les essais sur les thérapies anti-anxiétéDe manière générale, il a été constaté que pour tous les diagnostics dans les études considérées, les patients présentaient des améliorations notables de la gravité des symptômes pendant le traitement par placebo, par rapport à la situation de départ. Mais l'ampleur de l'effet a varié d'un diagnostic à l'autre.L'effet le plus important a été observé chez les patients souffrant de TDM, suivis par ceux souffrant de TAG. La schizophrénie a eu l'effet le plus faible, suivi par les TOC. Mais la réponse au placebo a également varié de manière significative entre les différentes études portant sur la même pathologie.Somme toute, les auteurs ont fait état de cinq conclusions clés:L'amélioration des symptômes s'est produite dans toutes les conditions pendant le traitement par placebo.Les améliorations ont été d'une ampleur considérable.L'amélioration variait considérablement d'un trouble à l'autre. Elle était particulièrement forte dans le TDM et le TAG, tandis que la schizophrénie, le TOC et la manie ne présentaient que des améliorations modestes.Pour la plupart des diagnostics, il y avait une variabilité substantielle ou considérable des améliorations dans toutes les études.Les femmes avaient tendance à présenter des améliorations plus importantes dans les groupes placebo.Cependant, pour connaître réellement le pouvoir du placebo, il faut comparer un groupe placebo à un groupe non traité. «Cela est nécessaire en raison des facteurs de confusion qui peuvent "imiter" l'effet placebo, par exemple l'évolution naturelle de la maladie», selon une analyse de 2022 parue dans Naunyn Schmiedeberg's Archive of Pharmacology (le journal officiel de la Société allemande de pharmacologie et de toxicologie expérimentale et clinique).Cette revue indique que «les découvertes des deux dernières décennies ont montré que le placebo, en tant que substance inactive, déclenche une série de réponses neurohormonales dans le cerveau des patients et des sujets sains qui pourraient constituer la base anatomique et physiologique de ses effets.»Les effets placebo et les réponses placebo sont connus en médecine: on les observe en dermatologie, en gastro-entérologie, en urologie, en cardiologie et même en chirurgie, avec la chirurgie fictive. Ils ont des effets sur la douleur, les nausées, l'insomnie, les troubles neuropsychiatriques, et plus encore. L’effet tend à soulager les symptômes, mais, comme on peut s'y attendre, il n'a pas de pouvoir curatif. Les effets ont tendance à être de courte durée, mais ils peuvent parfois durer plusieurs jours après l'arrêt du traitement.Il est intéressant de noter que dans le cas de la maladie de Parkinson, les effets placebo ne fonctionnent que chez certains patients.«Pour que la réponse placebo se produise, il est essentiel que le cortex et ses connexions ne soient pas ou peu affectés, car chez les patients atteints de la maladie de Parkinson qui présentent une interruption de ces voies, la réponse ne se produit pas. Il en va de même dans les démences où un grand nombre de neurones du pôle frontal sont détruits», établi la revue.À lire aussi: Parkinson: pas besoin de reconnecter les neurones?Il existe deux types de placebo. Le placebo «pur» est une substance inerte telle que l'amidon, le dextromaltose, le lactose, le talc, l'eau mentholée et le sérum physiologique. L'autre est un placebo «impur» qui peut être constitué de vitamines, de minéraux, d'antibactériens et de substances psychotropes utilisés à des doses sous-thérapeutiques. Les auteurs affirment qu'il n'est pas rare que des placebos soient utilisés en clinique et qu'environ 40% des prescriptions finissent par fonctionner comme des placebos. Parfois les médecins en sont conscients, alors que parfois non. Une étude a révélé qu'en moyenne 63% des médecins y ont recours, et que nombre d'entre eux utilisent des placebos impurs.La méta-analyse indique qu'il pourrait y avoir des types de personnalité plus sensibles au placebo, avec des différences d'effet entre les personnes optimistes et pessimistes.«Les facteurs associés à l'effet placebo comprennent également le conditionnement antérieur à la prise de celui-ci, l'environnement et le lieu où il est administré, les attentes positives du patient concernant le traitement à recevoir, la personne qui l'administre et le lieu où il est administré», explique l’analyse.Il est également important que le patient soit conscient lorsqu'il l'utilise, car «l'effet placebo n'apparaît pas chez les sujets dans le coma ou atteints de démence sévère.» Dans une autre analyse, publiée dans le NEJM, les auteurs soulignent que des effets nocebo peuvent également se produire lorsque le placebo administré finit par bloquer les traitements, ou par aggraver ou déclencher des symptômes. Certaines études suggèrent que le fait de suggérer directement des effets secondaires potentiels peut s'avérer auto-réalisateur. La question de savoir si les placebos doivent être utilisés dans les études fait l'objet d'un débat au sein de la recherche, tout comme celle de l'éthique et de l'efficacité de leur utilisation dans la pratique clinique. Le sujet fait également l'objet de nombreuses études, et une revue intitulée Journal of Interdisciplinary Placebo Studies (études interdisciplinaires sur les placebos) lui est même consacrée.

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