Les départs massifs à la retraite des médecins préoccupent le CMQ

Le nombre de médecins retraités progresse rapidement, alors qu’environ 20% des Québécois n’ont toujours pas accès à un médecin de famille. En effet, 780 médecins de 60 ans et plus (386 omnipraticiens et 394 spécialistes) sont devenus en 2021 des membres inactifs du Collège des médecins du Québec (CMQ), selon les données de ce dernier, obtenues par ProfessionSanté.ca. Cela représente 3% des médecins du Québec. En comparaison, le nombre de membres devenus inactifs était de 615 en 2020, et de 400 en 2019, l'année précédant la pandémie. Ces membres sexagénaires «ont probablement pris leur retraite», explique le CMQ, en ajoutant qu'il n’existe pas encore de moyens de préciser les raisons pour lesquelles un médecin est devenu «inactif». Selon le président du Collège, le Dr Mauril Gaudreault, la pandémie a convaincu plusieurs médecins d’expérience de quitter la profession. «Dans l'un de nos récents sondages, plusieurs médecins ont affirmé ressentir beaucoup de fatigue physique et mentale. Nous pouvons sans doute affirmer que la pandémie a eu un effet important dans leur décision.» La forte augmentation des départs à la retraite inquiète le Collège, d’autant plus qu'il manque déjà 1000 médecins de famille au Québec et que la plupart de ceux qui prennent leur retraite s'occupent d'un grand nombre de patients. «À 60 ans, les médecins ont une clientèle bien établie de 1000, 1500 ou 2000 patients. Ainsi, lorsqu’ils quittent la profession, leurs patients deviennent orphelins. C’est un problème qui préoccupe beaucoup notre organisation», soutient le Dr Gaudreault. Autre aspect préoccupant: un médecin sur quatre est âgé de plus de 60 ans au Québec, ce qui représente environ 5600 médecins. Parmi ces derniers, plusieurs décideront sans doute de prendre leur retraite d'ici les prochaines années. Au rythme auquel les médecins prennent leur retraite, les prévisions du ministère de la Santé - soit 5800 départs à la retraite d’ici 2031- risquent d’être dépassées. Un appel à la responsabilité sociale Devant l’augmentation du nombre de médecins retraités, le Collège des médecins a mis sur pied l’an dernier un chantier sur l’accès à un médecin et la cessation d’exercice, auquel participent notamment les fédérations de médecins. Ce chantier se penche principalement sur trois enjeux: mieux accompagner les médecins vers la retraite, déterminer comment poursuivre le suivi des patients et optimiser la contribution d’autres professionnels de la santé. «Souvent lorsqu’un médecin cesse son exercice, ses patients ne sont pas pris en charge», déplore le Dr Gaudreault, qui en profite pour faire appel à la responsabilité sociale des médecins. «Le médecin est bon pour allier l’éthique de responsabilité individuelle entre son patient et lui. Mais il doit aussi tendre vers une éthique de responsabilité entre un groupe de médecin et la population qu’il dessert», poursuit-il. Une meilleure communication entre médecins Si, dans les prochains mois, le Collège veut donner des outils aux médecins pour qu'ils planifient et organisent mieux leur retraite, il souhaite également une meilleure communication entre médecins pour assurer la prise en charge des patients devenus orphelins. Mais comment peuvent-ils assurer le suivi de ces patients lorsqu’ils sont déjà surchargés de travail? La réponse a été maintes fois donnée, notamment en commission parlementaire sur le projet de loi 11 en janvier dernier: il faut travailler en interdisciplinarité. «Le médecin de famille ne doit plus être l’unique porte d’entrée dans le réseau. Pour améliorer la prise en charge des patients qui perdent leur médecin, il faut travailler avec les autres professionnels de la santé», souligne le Dr Gaudreault. D'après le président du CMQ, il faut emprunter cette voie puisqu’il est possible que, dans quelques années, le nombre de médecins de famille et de spécialistes au Québec n’augmente pas suffisamment, voire régresse, par rapport au nombre actuel. Et ce, même si un peu plus de 900 étudiants sont accueillis dans les facultés de médecine chaque année. Pourrions-nous en accueillir davantage dans les universités pour remplacer les médecins qui accrochent leur sarrau? Selon le Dr Gaudreault, ce serait difficile: «Les facultés sont déjà au maximum de leur capacité ou presque», constate-t-il.

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