L’aspirine ne devrait pas être recommandée comme traitement adjuvant du cancer du sein

Des hypothèses avaient été émises quant à l’influence de l’acide acétylsalicylique (AAS) — connu sous le nom commercial d’aspirine — sur la croissance des tumeurs par le biais de ses effets antiplaquettaires et anti-inflammatoires. Les plaquettes peuvent contribuer aux métastases de plusieurs façons, en favorisant notamment l’angiogenèse tumorale, en induisant la libération de facteurs de croissance et de cytokines, ou encore en protégeant les cellules tumorales de l’élimination par les lymphocytes T. L’inflammation induit également la libération de cytokines et de facteurs de croissance qui peuvent favoriser la croissance tumorale et le dérèglement immunitaire. L’aspirine à faible dose (moins de 100 mg par jour) a principalement des effets antiplaquettaires et antithrombotiques, alors que des doses supérieures à 300 mg/j sont nécessaires pour agir sur les voies inflammatoires.Des études observationnelles sur les survivantes du cancer du sein et des essais prospectifs sur l’aspirine pour le traitement des maladies cardiovasculaires ont suggéré une amélioration de la survie au cancer du sein chez les consommatrices régulières d’AAS. Toutefois, il n’existe pas d’études prospectives sur l’utilisation de l’aspirine pour prévenir les récidives du cancer du sein.Pour déterminer si la prise d’AAS diminue le risque d’événements cancéreux invasifs chez les survivantes du cancer du sein, un essai randomisé, en double aveugle, contrôlé par placebo (appelé A011502), a été mené aux États-Unis et au Canada. Il s’agirait du premier essai randomisé, contrôlé par placebo, portant spécifiquement sur l’aspirine chez les survivantes du cancer du sein. L’étude a inclus 3020 participantes (âgées de 18 à 70 ans) atteintes d’un cancer du sein non métastatique à haut risque, recrutées dans 534 sites aux États-Unis et au Canada. Les participantes ont été randomisées à parts égales pour recevoir 300 mg d’ASA ou un placebo une fois par jour pendant cinq ans. La dose de 300 mg/j a été choisie pour couvrir plusieurs mécanismes d’action possibles (antiplaquettaire et anti-inflammatoire) plutôt que d’évaluer uniquement la dose la plus faible (antiplaquettaire) et de risquer de passer à côté d’un effet clinique possible. Le résultat principal était la survie sans maladie invasive. Elle a été définie comme le temps écoulé entre la randomisation et la première apparition de l’un des événements suivants: récidive à distance, récidive locorégionale, cancer du sein ipsilatéral ou controlatéral, second cancer invasif primaire (non mammaire) ou décès, quelle qu’en soit la cause. La survie globale était un résultat secondaire clé.Les résultatsUn total de 3020 participantes avaient été randomisées lorsque le comité de surveillance des données et de la sécurité a recommandé de suspendre l’étude après la première analyse intermédiaire parce que le rapport de risque (HR) avait franchi la limite de futilité pré-spécifiée. Après un suivi médian de 33,8 mois, 253 événements de survie sans maladie invasive ont été observés (141 dans le groupe AAS et 112 dans le groupe placebo), soit un HR de 1,27 (IC à 95%, 0,99-1,63; p=0,06). Tous les événements de survie sans maladie invasive, y compris le décès, la progression invasive (à la fois à distance et locorégionale) et les nouveaux événements primaires, étaient numériquement plus élevés dans le groupe ASA, bien que les différences ne soient pas statistiquement significatives. Aucune différence significative n’a été observée au niveau de la survie globale (HR, 1,19; IC à 95%, 0,82-1,72). Les taux d’effets indésirables de grade 3 et 4 étaient similaires dans les deux groupes.Les auteurs concluent que le traitement par AAS 300 mg par jour n’améliore pas le risque de récidive du cancer du sein ou la survie chez les patientes atteintes d’un cancer du sein non métastatique à haut risque. Les patientes ayant des antécédents de cancer du sein précoce ne devraient pas être encouragées à prendre de l’AAS en tant que traitement adjuvant afin d’améliorer les résultats de leur cancer du sein.Référence: Chen WY, Ballman KV, Partridge AH, et coll. Aspirin vs placebo as adjuvant therapy for breast cancer. The Alliance A011502 randomized trial. JAMA. Publié en ligne le 29 avril 2024.

L’aspirine ne devrait pas être recommandée comme traitement adjuvant du cancer du sein

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