La santé mentale au travail: une responsabilité du gestionnaire

Le gestionnaire joue un rôle important dans le maintien d’une bonne santé psychologique au travail.C’est un des rôles clés que Rose-Marie Charest, présidente de l’Ordre des psychologues du Québec, a tenu à rappeler aux participants de la première édition du Rassemblement pour la santé et le mieux-être en entreprise (1), qui s’est tenu les 13 et 14 mai dernier à Montréal.« J’ai toujours trouvé qu’un gestionnaire est celui qui est le plus mal pris dans une organisation. D’abord, il est pris entre la direction qui l’influence et le personnel qu’il doit influencer, explique la psychologue clinicienne Rose-Marie Charest. Puis, une chose encore plus fondamentale, il doit prendre le temps de gérer les relations entre les membres de son personnel, c’est-à-dire être sensible à ce qui se passe, au climat de travail. »Elle déplore d’ailleurs que les gestionnaires aient de moins en moins de temps pour gérer les relations dans les organisations. Pourtant, il est bien connu qu’il vaut mieux gérer les petits problèmes de tension au sein du personnel avant qu’ils deviennent trop grands et créent un clivage entre deux groupes.« Le gestionnaire a donc une grande responsabilité. C’est pourquoi il a besoin d’être aidé, estime-t-elle. Quelqu’un qui a le regard frais peut nous aider à voir ce qu’on ne voit pas. »Responsabilité partagéeLe travail est avant tout un lieu de rencontre entre différentes expertises et entre plusieurs relations. C’est un espace commun que les gens occupent et qui leur donne un sentiment d’appartenance.« Dans un couple, cet espace commun comprend trois territoires : le nôtre, celui de l’autre et celui que l’on crée ensemble. Dans une équipe de travail, il y a la même chose. Il y a la somme des personnes qui sont là et cet espace qu’on réussit à créer ensemble et qui est essentiel dans un milieu de travail », explique Rose-Marie Charest.Par conséquent, lorsqu’elle parle de responsabilité partagée dans une relation, quelle qu’elle soit, c’est qu’il est impossible pour un individu d’en assumer seul la responsabilité.« Devant une personne, on est un collègue, un gestionnaire, un professionnel, un consultant, un ami, un conjoint, soutient-elle. On a tous une responsabilité. »Miser sur les forces« On associe trop souvent le travail à la maladie. Notre société doit se pencher là-dessus. Je n’en peux plus d’entendre l’expression « les problèmes de santé mentale au travail ». D’ailleurs, j’ai beaucoup de difficulté à croire à un problème de santé mentale au travail qui commence à 9 h et qui finit à 5 h », remarque la psychologue.C’est pourquoi elle se réjouit qu’en psychologie du travail on commence à développer de plus en plus la psychologie positive, c’est-à-dire qu’on s’appuie sur les forces des gens pour les développer plutôt que de constamment essayer de contrer leurs faiblesses ou leurs « points à améliorer ».« La santé mentale au travail, c’est beaucoup plus qu’éviter la maladie. Mais peut-on toujours éviter la maladie ? Non, mais on peut en diminuer la fréquence, les risques et l’intensité. Surtout, ce qu’on peut faire, c’est d’augmenter les forces de récupération et de résilience à l’intérieur de soi pour aller vers les autres, poursuit-elle. Parce lorsqu’on aura des problèmes, on aura besoin des autres pour prendre appui. »On ne peut pas empêcher une personne de faire une chute dans un escalier, mais si on installe une rampe, il y a une chance que cette personne se blesse moins. Elle pourra prendre appui sur quelque chose, illustre-t-elle.Source de valorisation« Dans ma pratique, j’ai traité beaucoup de gens qui souffraient d’un épuisement professionnel, dit Rose-Marie Charest. Ils avaient tous travaillé fort, mais je n’ai vu personne qui était en épuisement professionnel seulement parce qu’il avait travaillé fort. Il avait travaillé fort, mais cela n’avait pas été valorisant pour lui. Il avait travaillé fort dans un contexte de stress et de tension énorme. » Or, travailler fort avec des résultats fait partie de la santé en général, ajoute-t-elle.Selon elle, un des grands problèmes – que l’on soit gestionnaire, collègue, parent, ami, conjoint – est de faire une demande à quelqu’un en le privant des moyens pour y répondre.En somme, pour se sentir bien au travail, une personne a besoin de se sentir valorisée, mais elle a surtout besoin de se sentir efficace et de voir que ses efforts lui ont permis d’arriver à un résultat.________1. Le Rassemblement pour la santé et le mieux-être en entreprise a été organisé en collaboration avec l’Association des professionnels en santé au travail et Opus 3.

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