La dexaméthasone peropératoire améliore la survie des patients atteints de cancer

La dexaméthasone est généralement administrée au début de l'opération pour prévenir les nausées et les vomissements, mais de récentes études ont suggéré qu'elle pourrait jouer un rôle dans le ralentissement de la croissance de certains types de tumeurs, a déclaré le Dr Maximilian Schaefer, professeur adjoint d'anesthésie à la Harvard Medical School, qui s'est exprimé lors de la réunion annuelle d'Anesthésiologie de 2021. Il a présenté les résultats d'une vaste étude rétrospective comparant la survie à 90 jours entre les patients ayant reçu de la dexaméthasone en chirurgie et ceux n'en ayant pas reçu. «C’est la première vaste étude à démontrer que, pour une grande variété de cancers où le système immunitaire ne joue pas un rôle majeur, les effets positifs (de la dexaméthasone) semblent prédominer», a-t-il déclaré. À lire aussi: Cancer de la prostate: énormes progrès au Canada dans le taux de décès Le médicament n'est pas donné à tout le monde; il est administré si le patient présente un risque de nausées et de vomissements post-chirurgie. «C'est à la discrétion de l'anesthésiste, et parfois d'autres antiémétiques sont utilisés à la place», a précisé le Dr Schaefer. Une étude précédente qu'il a coécrite en 2018 a révélé que l'utilisation peropératoire de la dexaméthasone est associée à un meilleur taux de survie chez les patients atteints de cancer du pancréas. D'autres études ont suggéré que ce médicament a une activité antitumorale et est utilisé comme agent chimiothérapeutique principalement dans les hémopathies malignes. «Ce sont surtout des études in vitro qui montrent que la dexaméthasone pourrait inhiber la croissance des tumeurs, ou inhiber la croissance des tumeurs et des cancers», mais le fait qu'elle puisse aider les patients atteints de cancer est un concept convaincant, a-t-il déclaré. Le médicament supprime également certaines parties du système immunitaire, ce qui pourrait aussi potentiellement influencer la croissance du cancer. Les chercheurs ont émis l'hypothèse que la dexaméthasone peropératoire réduirait la mortalité chez les patients subissant une chirurgie du cancer. L'étude a porté sur une grande variété de cancers. La prise de dexaméthasone n'a pas été poursuivie après l'opération. À lire aussi: Cancer: les mots pour le dire Les données relatives aux patients ayant subi une intervention chirurgicale pour l'ablation de tout type de tumeur maligne solide ont été obtenues auprès du Beth Israel Deaconess Medical Center (entre 2005 et 2020) et du Massachusetts General Hospital (entre 2007 et 2015). Le principal indicateur de résultat était la mortalité dans les 90 jours suivant l'opération. Les données de 74 058 patients adultes ont été utilisées. Au total, 25 178 (34,0%) des patients ont reçu de la dexaméthasone peropératoire, à une dose moyenne de 7,0 mg. Parmi ces patients, 25,7% étaient des hommes, l'âge moyen était de 56 ans et la durée moyenne de la chirurgie était de 152 minutes. Dans ce groupe, 209 patients (0,83%) sont décédés dans les 90 jours suivant l'intervention. Un total de 48 880 patients n'ont pas reçu de dexaméthasone peropératoire. Ce groupe était composé d'un plus grand nombre d'hommes (46,4%), avait un âge moyen de 63 ans et une durée moyenne d'intervention chirurgicale plus courte (95 minutes). Il y avait également plus de patients ayant des antécédents d'hypertension (40% contre 25,1% dans le groupe dexaméthasone). Dans ce groupe, 1543 (3,2%) sont décédés dans les 90 jours suivant l'opération. Le Dr Schaefer a fait remarquer que les patients qui reçoivent habituellement de la dexaméthasone sont plus jeunes et que la durée de l'opération est plus longue. Être une femme et être non fumeur sont considérés comme deux facteurs augmentant le risque de nausées et de vomissements. À lire aussi: Cancer: les espoirs immenses soulevés par les anticorps thérapeutiques Les chercheurs ont ajusté les données démographiques des patients, les comorbidités, les facteurs peropératoires ainsi que les administrations de stéroïdes et les chimiothérapies préopératoires. Même avec ces ajustements, l'administration peropératoire de dexaméthasone a été associée à une diminution statistiquement significative du risque de mortalité à 90 jours par rapport aux patients sans dexaméthasone, a déclaré le Dr Schaefer. L'âge a été considéré dans les analyses, et lorsque le plus jeune âge a été ajusté, ceux qui ont reçu le médicament avaient toujours un risque réduit de 21% de mourir dans l'année suivant la chirurgie. L'effet de l'amélioration de la survie à 90 jours a été plus important chez les patients opérés pour des cancers non immunogènes, principalement des sarcomes, et des cancers du sein, de l'utérus, de l'ovaire, de l'œsophage, du pancréas, de la thyroïde, des os et des articulations. La dexaméthasone interagit avec le système immunitaire. Il est connu que le contrôle de la croissance de certains types de tumeurs par le système immunitaire peut être important. «La dexaméthasone a un effet suppressif sur le système immunitaire. Donc, pour ces types de tumeurs, où le système immunitaire est important, cela pourrait contrebalancer l'effet suppressif direct sur la tumeur», a-t-il déclaré. «Nous avons examiné l'effet différentiel sur ce que nous appelons les tumeurs immunogènes et non immunogènes. Nous avons constaté que la dexaméthasone n’avait un effet sur le taux de mortalité que chez les patients pour lesquels le système immunitaire n'est pas important pour contrôler la croissance du cancer», a-t-il ajouté. Les patients atteints d'autres types de cancers étaient par ailleurs comparables entre le groupe avec dexaméthasone et le groupe sans dexaméthasone. D'autres études doivent être menées sur des cancers et des types de tumeurs spécifiques, a-t-il ajouté. «Les données sont intéressantes et convaincantes, la dexaméthasone est peu coûteuse et facilement disponible», a déclaré la Dre Erin Powell, oncologue et professeure associée de médecine à l'Université Memorial. Bien qu’elle n’ait pas participé à l'étude, elle a néanmoins fait remarquer qu'«il ne s'agit pas d'une étude randomisée et que des recherches supplémentaires sont nécessaires».

La dexaméthasone peropératoire améliore la survie des patients atteints de cancer

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