«Sur les pas de… la Dre Justine Galarneau-Girard» − 1er épisode

Justine Galarneau-Girard, 25 ans, a enfilé son sarrau de médecin de famille et facturé pour la première fois le 1er octobre dernier. Un peu «fébrile» à l’idée d’être livrée à elle-même, la jeune femme a plutôt été surprise de voir que sa confiance en elle augmentait à chaque nouveau quart de travail.Pour entreprendre cette nouvelle série «Sur les pas d’un médecin», Profession Santé a choisi de faire un bout de chemin avec cette jeune médecin pour découvrir si ses aspirations se concrétiseraient et pour cerner les difficultés auxquelles elle devrait faire face.Très généreuse, la Dre Galarneau-Girard a accepté de prendre régulièrement un peu de son temps pour répondre à nos questions et partager son expérience. Deuxième épisode dans un mois.Justine Galarneau-Girard: une jeune médecin de famille s’installe au cœur de la GaspésieDiplômée avec les honneurs en 2012, la Dre Galarneau-Girard a été lauréate de la bourse d’excellence «Espoir d’une génération» du Fonds de recherche et d’enseignement du Département de médecine familiale et de médecine d’urgence (DMFMU).En attendant de pouvoir faire de la prise en charge dans sa future clinique médicale, ce jeune médecin partage son temps entre des quarts d’urgence et d’hospitalisation. «J’ai été recrutée pour faire de l’urgence au CLSC de Paspébiac, et j’ai des droits de pratique en hospitalisation à l’Hôpital de Maria», précise-t-elle.Malgré son jeune âge, elle s’implique aussi dans le milieu médical. Après avoir été représentante des résidents au Collège québécois des médecins de famille, elle y est maintenant vice-présidente des communications par intérim, en remplacement de la Dre Caroline Laberge.La petite histoire derrière l'histoireL’actualité médicale a rencontré la Dre Justine Galarneau-Girard il y a deux ans, alors qu’elle était encore résidente en médecine de famille. À l’époque, elle participait à un souper-bénéfice destiné à récolter des fonds pour la santé dans la Baie-des-Chaleurs. C’était aussi l’occasion de présenter quelques initiatives élaborées dans le but, avoué, d’attirer de jeunes médecins en Gaspésie. Là-bas, le recrutement et la rétention du personnel médical sont des défis de tous les instants.Le Dr Sébastien Toussaint, directeur des services professionnels et du soutien clinique du Centre de santé et des services sociaux (CSSS) de la Baie-des-Chaleurs à l’époque, cherchait pour sa région une douzaine d’omnipraticiens afin de combler les postes qui découlaient de la mise en place de la nouvelle Unité de médecine de famille de Maria.La Dre Galarneau-Girard espérait bien en obtenir un. Née dans la région, elle comptait en effet «rentrer» chez elle pour exercer. «Mes parents, originaires de Montréal et de Ville-Marie, au Témiscamingue, se sont installés à Bonaventure en 1979 et ils y ont toujours maintenu une attache. Qui plus est, mon conjoint est également originaire de Bonaventure. Je commence donc à exercer, entourée de mes parents, de ma sœur, de mes beaux-parents et de mes amis enfance», dit-elle.À une époque où la médecine familiale et ses plus jeunes représentants – surtout représentantes – étaient particulièrement mis à mal dans les médias, la résidente débordait d’enthousiasme à l’idée d’aller faire de la prise en charge en région. «Je voulais être une personne-ressource pour mes patients, pouvoir répondre à tous leurs problèmes, des plus bénins aux plus graves. J’avais envie de suivre les personnes dans le temps, dans leurs étapes de vie, je voulais suivre des familles entières.» Bref, des envies bien éloignées de celles que l’on prête à sa génération!En 2010, le Dr Gaétan Barrette, président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, avait commencé à répéter à qui voulait l’entendre qu’il n’y avait pas de pénurie de médecins de famille et que les problèmes d’accès à la première ligne résultaient du fait que ces derniers devaient «travailler davantage et recevoir plus de patients».Le débat avait déraillé et, par médias interposés, il ressortait un étrange portrait des aspirants à la médecine de famille. On les présentait comme étant plus intéressés par leur qualité de vie que par les besoins de la population. On les disait aussi très contents de se laisser tenter par une pratique mixte alliant milieu hospitalier et sans-rendez-vous, pratique ayant pour conséquence de complètement délaisser la prise en charge d’une clientèle jugée trop exigeante, compliquée, délétère, pour ne pas dire pas rentable, voire coûteuse.À l’opposé de cette image, la résidente de l’UMF Laurier m’a parlé avec des étoiles dans les yeux de la future clientèle de la clinique médicale qu’elle bâtirait, ainsi que de la maison sur laquelle elle et son conjoint avaient un œil et dans laquelle ils comptaient s’installer lorsqu’elle commencerait à exercer.Avec Justine, pas besoin d’aller faire un tour dans les sites touristiques de la Gaspésie. J’avais envie de partir dans ce coin de la province rien qu’à l’entendre le décrire: «La vie, ici, est extraordinaire: vue sur la mer en permanence, parc de la Gaspésie à proximité, belles routes de vélo de montagne, routes de randonnées, gens chaleureux, belle équipe de travail…»Restait à voir si les rêves et les espoirs de la jeune femme survivraient à une première année de pratique. Voici donc un premier rendez-vous où elle nous parle de ses attentes et de quelques-unes de ses premières constatations sur le terrain. Rendez-vous dans quelques semaines pour voir où elle en est.À lire aussi:1er épisode, 2e partie: «la médecine de famille était faite pour moi»Tous les épisodesLe Centre de santé et des services sociaux de la Baie-des-Chaleurs (CSSSBC), c’est:- 5 CLSC (Paspébiac, Caplan, Saint-Omer, Pointe-à-la-Croix et Malauze)- 3 centres d’hébergement (New Carlisle, Maria et Matapédia)- 1 hôpital (Maria),- 1 Unité de médecine familiale Baie-des-Chaleurs (UMF)Urgence Maria: 21 239 visites (dont plus de 1000 en soins courants)Urgence Paspébiac: 21 318 visites (donc près de 5500 en soins courants)Hospitalisation: 3315 admissions en courte duréeCliniques externes: 21 352 visitesBloc opératoire: 5041 interventionsChirurgie d’un jour: 3069 interventionsConsultations médicales en CLSC (5): 5698 usagers, 19 094 consultations- Médecins de famille (54 membres actifs et 2 associés)- Médecins spécialistes (29 membres actifs et 66 associés)(Cliquez sur la carte pour l'agrandir) Entrevue avec la Dre Justine Galarneau-Girard:«La médecine de famille était faite pour moi»Justine Galarneau-Girard, jeune médecin de famille installée dans la Baie-des-Chaleurs, inaugure notre nouvelle série «Sur les pas d’un médecin». Nous vous proposons de faire un bout de chemin avec elle pendant plusieurs mois afin de découvrir son quotidien, ses souhaits, ses difficultés aussi. Dans cette première entrevue, elle dévoile ses aspirations.Pourquoi avoir choisi la médecine de famille?Au tout début de mes études en médecine, j’avais le sentiment que la médecine de famille était faite pour moi. Le côté «généraliste», qui me permet de comprendre et de soutenir mon patient dans sa globalité et son entièreté, m’a toujours attirée.De plus, ma personnalité fait que j’aime toucher à tout. La médecine de famille est une carrière de rêve pour moi. On voit de tout, des patients de tous les âges et dans des milieux différents: à l’urgence, à l’hospitalisation, au cabinet, etc.C’est aussi une pratique qui permet la gestion et l’enseignement. Et on peut changer de carrière à tout moment; par exemple, certains délaissent l’urgence pour faire du suivi de clientèle.De quel type de pratique rêviez-vous pendant vos études de médecine?D’une pratique diversifiée. J’avais envie de faire du bureau, de l’urgence et de l’hospitalisation avec des soins intensifs. Et j’aurais aussi voulu faire de l’obstétrique (on peut toujours rêver!)En arrivant à Bonaventure, à quoi vous attendiez-vous?Je m’attendais à ce que mon début de pratique soit intense. Je pensais avoir de la difficulté à prendre mes décisions et à gérer mon incertitude. J’étais habituée à ce que mon patron, lorsque j’étais résidente, choisisse pour moi, ou encore qu’il m’aide à décider. Je me disais que j’allais me retrouver toute seule devant mes notes, sans pouvoir discuter avec qui que ce soit. En fin de compte, je parle avec le patient et c’est lui qui m’aide. Il paraît que ça s’appelle «la décision partagée» – car, comme rien n’est ni blanc ni noir en médecine, plusieurs pratiques peuvent convenir pour traiter un même problème – et je décide finalement avec lui de la meilleure prise en charge.À votre avis, qu’est-ce qui risquait de vous surprendre le plus?Rencontrer des gens que je connais! Comme je suis originaire du coin, je savais que ce serait inévitable. Pendant mon prédoctorat à Sherbrooke et ma résidence à Québec, ça ne m’est pas souvent arrivé de soigner des gens que je connais.Des peurs avant de plonger dans le monde professionnel?J’avais terriblement peur de ne pas faire assez de débit. Mais je me suis vite aperçu que le nombre de patients augmente jour après jour. Au début, j’appelais souvent les spécialistes, car c’était la première fois que je rencontrais telle ou telle pathologie. Mais, rapidement, l’expérience et l’autonomie ont augmenté. Tout va beaucoup plus vite que pendant la résidence. Je vois le double de patients aujourd’hui.J’avais aussi peur de prendre des mauvaises décisions, de me tromper. Mais, humblement, je crois bien que ça arrive à tout le monde. J’avais peur enfin du regard de mes confrères. Je me demandais s’ils allaient me trouver à la hauteur…Ce que vous aviez le plus hâte de commencer?J’avais tellement hâte de prendre mes propres décisions, de ne plus avoir à revoir mon intervention avec un patron, après chaque patient…À lire aussi:1er épisode, 1e partie: une jeune médecin de famille s’installe au cœur de la GaspésieTous les épisodes

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