Interactions médicamenteuses majeures: un risque significatif chez les enfants en ambulatoire

En milieu ambulatoire, les événements indésirables liés aux médicaments sont une cause importante de morbidité et de mortalité chez les enfants. Ils engendrent chaque année environ 200 000 visites aux urgences aux États-Unis. Ils résultent aussi en de nombreuses hospitalisations, et des durées de séjour plus longues notamment. Environ 20 à 30% des événements indésirables liés aux médicaments – y compris les interactions médicamenteuses – pourraient être évités. Cependant, on sait encore peu de choses concernant les interactions médicamenteuses touchant les enfants en milieu ambulatoire. Une récente étude, publiée dans la revue Pediatrics de l’Académie américaine de pédiatrie, s’est donc penchée sur le sujet en examinant la prévalence des principales interactions médicamenteuses, ainsi que les facteurs associés à des taux d'exposition plus élevés à ces interactions chez les enfants pris en charge en ambulatoire.L’étude transversale a répertorié les données d’enfants âgés de zéro à 18 ans ayant eu au moins une consultation en ambulatoire et au moins deux ordonnances délivrées en ambulatoire (en pharmacie communautaire), à partir de la base de données Medicaid 2019 de Marketscan. À lire aussi: L’amoxicilline à privilégier pour la sinusite aiguë chez l’enfant?Les expositions aux interactions médicamenteuses ont été définies comme des expositions à une interaction médicamenteuse majeure connue pendant un ou plusieurs jours, telle que décrite dans DrugBank, une base de données en ligne accessible au public, également utilisée par les National Institutes of Health et la National Library of Medicine aux États-Unis. Cette base classe les interactions médicamenteuses en trois catégories: mineures, modérées et majeures. Seules les interactions médicamenteuses majeures – et donc les plus à même d’avoir de graves conséquences sur la santé des patients – avec des niveaux de preuve modérés ou élevés ont été incluses dans l'analyse, ce, afin de se concentrer sur les expositions aux interactions médicamenteuses les plus graves et les plus susceptibles de mettre en danger la vie des patients.Les critères principaux pris en compte étaient la prévalence et le taux d'exposition aux interactions médicamenteuses majeures. Les chercheurs ont eu recours à la régression logistique pour évaluer les caractéristiques des patients associées à l’exposition aux interactions médicamenteuses. Les taux d'exposition aux interactions médicamenteuses ont été mesurés pour 100 enfants par catégorie d'effets physiologiques indésirables et de répercussions sur les organes (par exemple, l’allongement de l'intervalle QT corrigé de la fréquence cardiaque).Les résultats sont les suivants:L'étude a porté sur 781 019 enfants ayant été exposés à deux médicaments ou plus; 21,4% d'entre eux ont été exposés à au moins une interaction médicamenteuse majeure au cours de l'année d'étude.Les adolescents (50,6%) et les garçons (58,6%) ont été les plus exposés aux interactions médicamenteuses majeures.Environ 8% des nourrissons et 17% des jeunes enfants ont été exposés à des interactions médicamenteuses majeures.La probabilité d'être exposé à une interaction médicamenteuse majeure augmente avec l'âge et avec la présence de plusieurs antécédents médicaux ou de santé mentale. Le taux d'exposition à une interaction médicamenteuse majeure est quatre fois plus élevé chez les adolescents que chez les enfants âgés de 0 à 1 an.Les médicaments les plus souvent impliqués étaient la clonidine (la plus fréquente), les médicaments psychiatriques (trazodone, rispéridone), les médicaments contre l'asthme (montelukast, cétirizine) et les médicaments contre le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité (comme les combinaisons de sels d'amphétamines) Lorsque l'on examine le taux d'exposition aux interactions médicamenteuses majeures pour 100 jours d'exposition à deux médicaments ou plus, les médicaments le plus souvent impliqués sont la dexaméthasone (106,2), la ziprasidone (102,0), la clonidine, la trazodone (84,0), le lopéramide (76,7) et la mirtazapine (75,3)Les catégories les plus courantes d'effets physiologiques indésirables causés par les principales interactions médicamenteuses étaient les altérations pharmacologiques (36,6%), les effets neurologiques (22,5%, en particulier la dépression du système nerveux central) et les conséquences cardiovasculaires (22,5%, en particulier l'allongement de l'intervalle QT). Sur la base de cette étude, les chercheurs concluent qu’aux États-Unis, un enfant sur cinq assuré par Medicaid est exposé chaque année à des interactions médicamenteuses majeures, avec un risque accru pour les adolescents et les enfants atteints de troubles médicaux ou mentaux.À lire aussi: Rappel d'un médicament contre la fièvre pour enfants en raison d'un risque de surdoseL'exposition aux interactions médicamenteuses accroît le risque d'événements indésirables liés aux médicaments et de conséquences néfastes pour la santé chez les enfants concernés. Des risques particulièrement difficiles à surveiller dans le cadre de soins en ambulatoire.Les auteurs encouragent ainsi les professionnels de la santé à s’informer sur les médicaments le plus souvent associés à des interactions médicamenteuses majeures. Plusieurs d’entre eux sont couramment prescrits. C'est le cas de la clonidine, la cétirizine, le montelukast, la dexaméthasone et les médicaments pour la santé mentale. Les auteurs préconisent en outre des recherches rétrospectives et prospectives supplémentaires afin d'améliorer notre compréhension des interactions médicamenteuses chez les enfants et de préciser les risques réels qu'elles représentent.

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