Insuffisance cardiaque: une application permet de réduire les visites aux urgences

L’insuffisance cardiaque (IC) est l’une des principales causes d’hospitalisation au Canada et, d’ici 10 ans, les coûts associés à la condition devraient atteindre 2,8 milliards de dollars par année au pays, selon la Fondation des maladies du Cœur et de l’AVC.«On offre beaucoup de traitements efficaces pour traiter l’insuffisance cardiaque, à condition qu’ils soient prescrits aux bonnes doses. Le problème, c’est qu’il y a beaucoup de patients à traiter en comparaison au nombre de rendez-vous de suivis disponibles. Il est difficile de faire un suivi adéquat rapproché», explique le Dr François Tournoux, cardiologue au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) et chercheur-clinicien au Centre de recherche du CHUM.Ce dernier ajoute qu’un patient sur cinq hospitalisés pour IC sera hospitalisé à nouveau dans les 30 jours suivant sa sortie de l’hôpital.CONTINUUM, un projet de surveillance à distance des patients et de thérapie numérique, a été mis sur pied dans le but de résoudre cette problématique. La plateforme est née d’un partenariat entre le CHUM, le Centre de recherche du CHUM, MEDTEQ+, Greybox Solutions Inc. et Boehringer Ingelheim Canada.L’objectif de ce projet est d'assurer un suivi adéquat aux patients, à distance et à la suite de leur hospitalisation pour insuffisance cardiaque, afin d’éviter une réhospitalisation.FonctionnementLe fonctionnement du programme est assez simple. Les patients sont invités à télécharger une application d’autosoins sur un téléphone intelligent ou une tablette à leur sortie d’hôpital. Puis, ils y enregistrent quotidiennement les données relatives à leurs signes vitaux, leurs poids et les symptômes de l’insuffisance cardiaque. Cela permet au personnel infirmier clinique du CHUM de faire un suivi à distance des données, une fois par jour.«Si certaines données sont hors normes, elles apparaissent en haut de la liste de l’infirmière qui s’occupe des suivis. De cette façon, elle les voit rapidement et peut intervenir en contactant le patient», explique le cardiologue.En plus de permettre le suivi des patients à distance, l’équipe médicale traitante reçoit des suggestions automatisées de médicaments en fonction des données fournies par les patients. L’application des patients suggère aussi des modules didactiques sur l’insuffisance cardiaque.Impact du programmePour tester la plateforme, une équipe de recherche dirigée par le Dr Tournoux a fait un essai contrôlé à répartition aléatoire de trois mois, mené chez des patients atteints d’insuffisance cardiaque, suivis en consultation externe et à risque d’hospitalisation.Au total, 171 patients ont été inclus dans l’essai; les résultats préliminaires des 63 premiers patients ayant terminé l’étude ont été présentés lors des séances scientifiques de l’American Heart Association, organisées en novembre à Philadelphie (Pennsylvanie).Parmi les 63 participants, 32 ont été suivis via le programme CONTINUUM (groupe d’intervention) et 31 ont reçu le traitement standard seul (groupe témoin).Les résultats montrent que le nombre de visites aux urgences ou d’hospitalisation par patient, toutes causes confondues, était de 0,19±0,47 pour le groupe d’intervention et de 0,55±0,89 pour le groupe témoin (p=0,05).Par ailleurs, le programme aurait également permis de réduire de 23% les coûts de soins de santé.Selon le Dr Tournoux, le suivi des patients avec la plateforme devrait être d’environ 12 semaines. Il ajoute que l’application est assez facile à utiliser, même par les patients plus âgés.Mais pour que ce genre de technologie soit efficace, il faut que les patients l’utilisent adéquatement, précise le cardiologue. «L'observance est l’élément clé de l’impact de ce type d’intervention, un peu comme l’adhésion au médicament est importante dans le succès d’un traitement».Futur du projetLe Dr Tournoux affirme que le prochain objectif serait d’implanter éventuellement CONTINUUM au sein des équipes cliniques du CHUM, dans un autre cadre qu'un projet de recherche. «Nous souhaitons réviser l’implémentation clinique de la plateforme, nous assurer qu’elle s’intègre bien dans un milieu réel de soins et qu’elle facilite le travail des professionnels de la santé», partage-t-il.Le cardiologue croit que si les équipes du CHUM adoptent la plateforme, le bouche-à-oreille fera en sorte que l’intégration de CONTINUUM dans les autres centres hospitaliers se fera sans doute aisément.

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