Hypocondrie, anxiété: Six façons d’aider vos patients

On estime qu’au moins 5 % de la population souffre d’hypocondrie, et beaucoup d’autres se débattent avec des formes plus légères d’anxiété liée à leur santé. Les sites médicaux et les séries télévisées où l’hôpital tient la vedette ne contribuent pas à réduire les inquiétudes de ces personnes. Grâce à une communication adaptée, vous pouvez les aider. Voici six trucs d'experts.La Dre Terri Paul est endocrinologue et enseigne la clinique à la faculté de médecine et de dentisterie Schulich à l’université Western Ontario, à London. La Dre Patricia Furer est psychologue clinique et professeur agrégée de psychologie clinique à l’université du Manitoba à Winnipeg.1. Validez les symptômes du patientLorsque des patients, présentant des signes d’hypocondrie ou d’anxiété liée à leur santé, vous décrivent leurs symptômes, la règle d’or est de toujours leur dire que vous les croyez. «Bien des patients viennent à mon cabinet après avoir tenté pendant des années de régler leur anxiété face à leur santé avec leur ancien médecin. Ils sont arrivés à la conclusion: “Le médecin pense que je suis fou”», dit la Dre Furer.Selon la Dre Furer, même si le médecin n'a pas énoncé clairement ce message, le patient a pu penser que son médecin n'était pas inquiet de la maladie dont il croit souffrir parce qu’il n'a pas reconnu ses symptômes.Avant même d’expliquer au patient pourquoi vous ne croyez pas qu’il souffre d’une tumeur au cerveau ou d’une rare maladie dégénérative vue sur Internet, dites quelque chose comme: «Je sais que votre souffrance est réelle, je sais aussi que vos symptômes représentent un vrai problème pour vous. Je comprends. Maintenant, trouvons une façon de régler ce problème», suggère la Dre Furer. De cette façon, vous débutez par une entente et vous lui faites comprendre clairement que vous vous occuperez du problème pour lequel il vous consulte.2. Faites parler l’individu plus que le patientLa Dre Paul suggère aux médecins de demander à leur patient pourquoi il est si inquiet à propos d’une maladie en particulier. Que ce soit parce qu’il a été témoin d’un proche qui en a souffert ou qu’il est tombé sur le sujet sur Internet, il sera plus facile pour vous de rassurer le patient si vous savez d’où viennent ses inquiétudes.La Dre Furer ajoute que la quantité d’information donnée au patient devrait varier en fonction de l’individu: certains patients retirent des bénéfices de connaître les détails sur les différents tests disponibles, et d’autres pas. En instaurant une relation à long terme et grâce à une bonne écoute, vous pouvez sentir quel type d’information est bonne pour le patient et quel type ne l’est pas.3. Proposez des stratégies à long terme, pas des tests à court termeFaire subir des tests au patient dans l’espoir que les résultats soient négatifs et calment ses angoisses est une stratégie risquée.D’une part, les tests peuvent montrer des anormalités plus ou moins bénignes risquant d'alarmer le patient davantage. «En endocrinologie, on effectue un examen par imagerie quand nous ne pouvons obtenir un diagnostic biochimique et 10 % de la population peut avoir des résultats anormaux sans avoir de problèmes», dit la Dre Paul.D’autre part, lorsque les médecins demandent des tests et adressent un patient à un spécialiste, ce dernier peut en conclure qu’il a des raisons d’être inquiet, ajoute la Dre Furer.Même si des résultats de tests négatifs peuvent soulager à court terme, la seule façon de régler l’anxiété du patient est de lui offrir des solutions durables. Les médecins devraient discuter des sensations physiques et des symptômes qui ont été scientifiquement liés au stress, afin que les patients puissent commencer à distinguer les symptômes provoqués par l’anxiété et ceux causés par d’autres maladies.Comme les patients hypocondriaques ont tendance à surveiller étroitement leur corps, les médecins devraient conseiller à leurs patients d’étendre cette habitude en notant leur réaction à leurs symptômes afin qu’ils puissent commencer à travailler sur leur mode de pensée, suggère la Dre Furer.Vous pouvez aussi aider vos patients à intégrer des stratégies de réponse en adoptant un point de vue holistique, en les questionnant sur leur mode de vie et leurs problèmes émotionnels en plus de questions sur les symptômes. Par exemple, le régime alimentaire du patient, ses habitudes de sommeil et d’activité physique peuvent contribuer à leurs symptômes et à leur anxiété.4. Encouragez les visites médicales de routine, au lieu d’attendre les crises«Nous ne souhaitons pas une situation où la personne s’inquiète d’une situation particulière et sent que la seule façon de faire face à cette détresse est de chercher de la réassurance chez son médecin», dit la Dre Furer. En prévoyant des rendez-vous à des intervalles réguliers, le médecin verra probablement son patient à un moment où il est moins inquiet et donc plus ouvert à des discussions générales sur la façon de gérer son anxiété.Par exemple, si un patient visite son médecin une fois par semaine lors d’une crise, ce dernier pourrait prévoir des visites de routine une ou deux fois par mois. Ainsi, le médecin montre son engagement à long terme avec ce patient tout en l’encourageant à se fier à des mécanismes de réponse alternatifs pendant un certain temps.Avec le temps, les rendez-vous peuvent s’espacer.5. Gardez l’esprit ouvertLorsqu’un patient se présente avec des inquiétudes sur un diagnostic improbable, la Dre Paul fait une anamnèse et effectue un examen physique.«Peut-être que je trouverai une autre avenue ou un autre diagnostic qui expliquerait les symptômes», dit la Dre Paul. De plus, cela montre au patient que le médecin prend sa santé au sérieux et ne les laisse pas en plan.Même avec les anxieux chroniques abonnés à leur médecin, il faut prendre au sérieux tout nouveau symptôme au cas où il y aurait une infection ou une maladie sous-jacente. «C’est très délicat, car ces personnes peuvent aussi être malades», dit la Dre Furer.Si vous êtes rendu au point de minimiser l’importance des symptômes du patient avant même de les entendre, il est alors temps de l’adresser à un collègue.6. Sachez quand adresser votre patient pour un traitementSi l’anxiété d’un patient par rapport à sa santé affecte sa vie quotidienne, vous devriez discuter des choix de traitement pour leur anxiété.«Il est important que le médecin sache combien de temps le patient consacre aux sites médicaux», dit la Dre Furer. De plus, les médecins peuvent juger de la gravité de l’anxiété du patient en lui demandant si elle interfère avec son travail ou ses relations personnelles.Lorsque vous expliquez les options psychologiques et pharmacologiques, n’oubliez pas de mentionner que les effets indésirables des médicaments peuvent nourrir les craintes de votre patient.Selon la Dre Furer, lorsqu’on présente aux patients les options de la médication ou de la thérapie cognitive comportementale, ils ont tendance à choisir la seconde.

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