Facturation réciproque: le Québec doit signer l'entente

« Heureusement, nous vivons dans un pays où les provinces peuvent se soutenir les unes les autres. » – Scott Moe, premier ministre de la Saskatchewan Les 18 derniers mois nous ont appris que nous ne pouvons jamais baisser la garde. La Saskatchewan, autrefois le berceau du régime public d’assurance maladie est maintenant l’épicentre de la pandémie au Canada. En octobre, elle comptait le plus grand nombre de patients occupant des lits aux soins intensifs (USI) par habitant que toute autre province à tout moment pendant la pandémie. Les Forces armées canadiennes ont été envoyées et, au 2 novembre, au moins 27 patients avaient été transférés aux USI en Ontario. Malheureusement, cinq de ces patients sont morts, dont un urgentologue de Regina. Le Yukon, malgré un taux de vaccination très élevé et le régime de congés de maladie payés le plus généreux au Canada, a connu une hausse soudaine des cas en juin et avait, au 2 juillet, le taux par habitant le plus élevé de COVID-19 au pays. Aussi en juin, le Manitoba a soudainement connu le taux le plus élevé de nouveaux cas en Amérique du Nord. Il a sollicité l’aide des Forces armées canadiennes, a demandé des vaccins excédentaires aux États-Unis et a transféré 51 patients en Ontario, deux en Saskatchewan et deux en Alberta. Le Nouveau-Brunswick, qui avait été épargné, a levé ses restrictions en matière de COVID-19 avant d’atteindre son objectif de vacciner 75% des résidents admissibles et subit maintenant une hausse importante des hospitalisations. La région sanitaire de Campbellton a récemment signalé le taux de mortalité le plus élevé au Canada. L’Alberta, qui comme la Saskatchewan, avait éliminé la plupart des restrictions en matière de santé publique au début de l’été, a également demandé aux Forces armées canadiennes de l’aider à faire face à son propre pic. L’Ontario a offert d’accepter les patients en USI, mais jusqu’à présent, aucun n’a été transféré. Cela est rendu possible grâce aux dispositions de portabilité de la Loi canadienne sur la santé. Pour les patients transférés qui viennent d’en dehors de la province, les hôpitaux de l’Ontario reçoivent, au-delà de leur budget global de l’assurance maladie de l’Ontario, un taux quotidien assez variable à l’USI : 1 857 $ à l’hôpital universitaire de London, 4 653 $ au Réseau universitaire de santé de Toronto, 1 713 $ à l’hôpital général de Hamilton, 4 381 $ au Horizon Santé-Nord de Sudbury et 4 848 $ à l’Hôpital d’Ottawa. Cela est finalement remboursé par la province ou le territoire de résidence du patient. Les Québécois ont la chance de faire partie du Canada. Par exemple, Horizon Santé-Nord à Sudbury impose des frais aux « non-résidents du Canada », comme les Américains, de 8 762 $ par jour à l’USI, tandis que l’Hôpital d’Ottawa facture 7 275 $. Cela ne comprend pas les honoraires des médecins. Contrairement à la situation en Europe, au Canada, on peut librement se rendre dans une autre province ou un autre territoire pour obtenir un traitement. Cela se produit fréquemment pour les patients de l’ouest du Québec. Il arrive parfois que des personnes de régions où le temps d’attente pour des services diagnostiques est long se rendent dans les grandes villes d’une autre province. Elles n’ont pas besoin d’une autorisation préalable de leur médecin de famille ni des autorités de santé provinciales, et leur province ou territoire de résidence paie au bout du compte les frais de médecin et d’hôpital. La carte d’assurance maladie européenne (ou la carte d’assurance maladie mondiale du Royaume-Uni) donne accès à des services de santé dans l’un des 27 pays de l’UE, en Islande, au Liechtenstein, en Norvège et en Suisse. Cependant, elle ne couvre pas les coûts si l’on voyage dans le but précis d’obtenir un traitement médical et ne garantit pas les services gratuits. Tel que stipulé à l’article 11 de la Loi canadienne sur la santé (LCS), en raison d’une entente de facturation réciproque signée par tous les territoires et la plupart des provinces, les médecins peuvent facturer l’assurance maladie de l’Ontario ou leur propre régime provincial de santé, recevoir leurs honoraires normaux et leur propre ministère de la Santé perçoit ensuite ce montant de la part de la province du patient. Il faut à cet égard se rappeler que la LCS a été adoptée à l’unanimité en 1984; c’est donc dire que tous les députés du Québec ont voté en sa faveur. Cependant, le Québec a continué à violer la LCS. Ses patients doivent habituellement payer le médecin directement, pour ensuite recevoir un remboursement partiel de leur propre province après plusieurs semaines. L’assurance voyage n’est pas une solution adéquate, car elle est souvent indisponible pour les services censés être couverts par le régime provincial de santé et les polices d’assurance peuvent également exclure les complications d’une maladie antérieure. En Ontario, de nombreux médecins facturent légalement des honoraires aux patients du Québec selon le barème des honoraires de l’Ontario Medical Association, qui est deux fois plus élevée que le barème des prestations de l’Assurance-santé de l’Ontario. Au fil des décennies, tous les ministres fédéraux de la santé ont ignoré ce problème. Justin Trudeau n’a fait aucune mention de cela dans sa lettre de mandat de décembre 2019 à l’ancienne ministre de la Santé, Patty Hajdu. Un éditorial du Toronto Star a souligné que la formation du nouveau Cabinet libéral marquait à la fois le symbolisme et la substance. Encore une fois, on a réalisé la parité entre les sexes. Le Québec compte près d’un quart de la population canadienne et est maintenant représenté au cabinet par 10 ministres sur 38. De façon symbolique, le nouveau ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, vient de la ville de Québec. Le nouveau porte-parole conservateur en matière de Santé, Luc Berthold, vient aussi du Québec. Ils devraient mettre la politique partisane de côté. Comme héritage durable pour ses collègues québécois, ils devraient fortement encourager Christian Dubé, ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, à signer l’Entente de facturation réciproque des services médicaux. Il y a de cela de nombreuses années, le Québec a refusé de signer cette entente de facturation par crainte que les médecins de l’Ouest du Québec ne se plaignent d’être moins payés pour le même service que leurs homologues de l’Ontario. Cependant, de 2005 à 2015, les revenus des médecins du Québec ont doublé. Il n’y a plus d’excuse à ne pas signer. Même si au Québec, le pire de la quatrième vague semble désormais passé, rappelez-vous que pendant la durée de la pandémie, il a eu le taux le plus élevé de décès liés à la COVID-19 par habitant de toutes les provinces. Si le Québec acceptait les avantages médicaux entièrement transférables, cela permettrait aux patients du Nouveau-Brunswick d’être transférés à des USI au Québec. Si un nouveau variant apparaît et qu’un afflux de cas graves surviennent au Québec, cela faciliterait le transfert des patients vers l’Ontario et les hôpitaux d’autres provinces. De plus, les Québécois apprécieraient des soins médicaux accessibles partout au Canada lorsqu’ils voyagent pour affaires ou visitent des amis et des membres de leur famille. Alors que la période des Fêtes approche, j’encourage Justin Trudeau à inclure cet enjeu dans sa lettre de mandat à Jean-Yves Duclos, une action symbolique, mais concrète qui serait bénéfique pour ses électeurs et qui pourrait promouvoir l’unité nationale. Comme le conclut l’éditorial du Toronto Star, « Trudeau a maintenant mis la table pour son troisième mandat. Comme d’habitude, il obtient un score élevé en symbolisme, mais le contenu du document reste encore à écrire. » Justin Trudeau ne devrait pas attendre qu’une autre vague de la pandémie frappe le Québec. Comme l’a déclaré l’ancien président américain John F. Kennedy, « Le meilleur temps pour réparer sa toiture, c’est lorsque le soleil brille. » Charles S. Shaver, M. D. Charles S. Shaver, médecin à Ottawa, est né à Montréal. Il a été président de la Section sur la médecine générale interne de l’Ontario Medical Association. Les opinions exprimées dans le présent article sont les siennes.

Facturation réciproque: le Québec doit signer l'entente

Pour accéder au contenu, connectez-vous ou créez un compte gratuit.

Catégories connexes