Événements cardiovasculaires et AVC: Un meilleur suivi médical pour contrer la baisse de revenus des patients

Les patients ayant subi un infarctus du myocarde, un arrêt cardiaque ou un accident vasculaire cérébral (AVC) risquent de voir leurs revenus diminuer, même s’ils retournent au travail, révèle une étude publiée dans le Canadian Medical Association Journal*. Toutefois, les professionnels de la santé et le gouvernement pourraient prévenir la situation.L’étude a examiné la situation de personnes de 40 à 61 ans, trois ans après leur hospitalisation, en raison de ces problèmes médicaux. Elle a comparé les données des hospitalisations et les rapports d’impôts dépersonnalisés d’environ 25 000 Canadiens de partout au pays, à l’exception du Québec et des Territoires. Les résultats permettent de constater que les personnes qui ont survécu à ces problèmes médicaux étaient moins susceptibles de travailler et enregistraient conséquemment de plus grandes baisses de leurs revenus annuels que celles d’âge identique qui n’avaient pas subi de tels événements.Les patients ayant eu un AVC enregistraient une plus forte baisse de revenus (- 31 %) que ceux qui avaient eu un arrêt cardiaque (- 23 %) ou un infarctus du myocarde (- 8 %). Leurs revenus durant la troisième année étaient inférieurs de 5 % à 20 % par rapport à la période précédant leur hospitalisation. Les auteurs de l’étude notent toutefois des limitations. Tout d’abord, les résultats excluent les patients qui sont décédés dans les trois ans suivant leur événement médical et seules les admissions qui ont nécessité une hospitalisation ont été étudiées. De plus, certaines variables n’ont pu être étudiées, telles que le niveau d’activité physique et la capacité fonctionnelle ultérieure des patients. Enfin, seuls les gains individuels ont été pris en considération, et non les revenus du conjoint, les revenus de placements ou les versements d’assurance invalidité. Psychiatre à l’Institut de cardiologie de Montréal, la Dre Judith Brouillette n’est pas étonnée des résultats. Selon elle, les invalidités prolongées et les arrêts de travail à durée indéterminée peuvent influer sur ces baisses de salaire. Il faut aussi établir un plan de match entre le médecin et le patient et le retour au travail fait partie de la discussion. Selon elle, il faut savoir trouver le juste milieu entre un retour trop rapide et un retour indéterminé, en soi risqué. Elle ajoute que, généralement, plus on attend avant de retourner au travail, plus recommencer est difficile.Elle est d’avis que ces événements médicaux sont assez majeurs et peuvent laisser des traces tant sur le plan physique qu’émotionnel. « Les patients qui avaient une vulnérabilité anxieuse avant la maladie peuvent avoir des peurs exagérées. Par exemple, un patient pourrait retarder certaines activités physiques par peur de refaire un infarctus, alors que l’activité physique pourrait prévenir un second infarctus. Ces patients feront de l’évitement, pouvant s’exprimer aussi dans la vie professionnelle. » Une diminution des tâches de travail peut entraîner une baisse de salaire, même si cette diminution n’était pas nécessairement recommandée par un médecin à l’origine.Les auteurs de l’article notent également que les patients avec un revenu plus faible au départ, ceux atteints de maladies chroniques comme le diabète et ceux dont le séjour à l’hôpital avait duré plus longtemps étaient davantage affectés financièrement.Dans le cas où les maladies entraînent des complications qui prennent du temps à apparaître, il est possible que le patient ne fasse pas le lien entre les nouveaux symptômes et son événement médical passé. « Un infarctus peut mener à de l’insuffisance cardiaque qui peut à son tour entraîner de la fatigue. Ou, dans le cas d’un AVC, certains troubles de l’attention peuvent se manifester plus tard. Le patient n’ira pas nécessairement consulter s’il n’est pas au courant que c’est une complication possible, mais sa performance au travail en sera modifiée », explique la psychiatre. D’où l’importance d’un bon suivi après le congé du patient, car ces symptômes pourraient être décelés et possiblement évités; ils auraient donc un impact moindre sur la vie professionnelle, selon elle.Même avant le congé, les médecins pourraient discuter de ces complications, afin que le patient soit bien au fait et porté à consulter si jamais elles apparaissaient à retardement. « Le médecin qui reprendra les soins du patient, comme le médecin de famille par exemple, devrait avoir toute l’information de la part du médecin traitant à l’hôpital. »Dre Judith Brouillette, psychiatre à l'Institut de cardiologie de MontréalLa Dre Brouillette ajoute que les médecins traitants ont la responsabilité de s’assurer d’une bonne liaison avec leurs pairs afin de favoriser la poursuite d’une prise en charge optimale. « Le médecin qui reprendra les soins du patient, comme le médecin de famille par exemple, devrait avoir toute l’information de la part du médecin traitant à l’hôpital. » Un tel événement médical représente souvent un point charnière dans la vie du patient et doit souvent s’accompagner d’un changement de mode de vie auquel les professionnels de la santé peuvent contribuer, ajoute-t-elle.Selon les chercheurs, le but de l’étude était principalement d’évaluer l’ampleur du problème afin de guider les gouvernements dans la mise en œuvre de politiques et de programmes d’aide, en vue, par exemple, de favoriser le retour au travail ou d’aider les personnes à accroître leur mobilité après un AVC. La Dre Brouillette ajoute que certains services pourraient être ajoutés à l’offre actuelle des CLSC, tels que des ateliers de retour au travail ou la prise en charge par des infirmières de relance. Dans le cas de difficultés à retourner au travail, la psychiatre suggère qu’il y ait une enquête afin d’en connaître les raisons et de ne pas hésiter à adresser le patient au professionnel de la santé adéquat, ergothérapeute, psychiatre, psychologue ou neurologue, par exemple.L’étude rappelle que les maladies cardiovasculaires et vasculaires cérébrales sont les causes de décès les plus courantes dans le monde. Un tiers des infarctus aigus du myocarde, un quart des AVC et 40 % des arrêts cardiaques surviennent chez les personnes en âge de travailler, soit en bas de 65 ans.* Garland A, Jeon SH, Stepner M, et coll. Effects of cardiovascular and cerebrovascular health events on work and earnings: A population-based retrospective cohort study. CMAJ 7 janvier 2019, 191(1)E3-E10.

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