Des nanoparticules d’or pour améliorer l’efficacité des traitements de pathologies de l’œil

Au cours de son existence, un Canadien sur cinq souffrira de l’une des cinq plus importantes maladies de l’œil: glaucome, rétinopathie diabétique, dégénérescence maculaire liée à l’âge, cataracte et rétinite pigmentaire. Leur traitement implique généralement l’utilisation, un jour ou l’autre, de gouttes afin de réduire l’inflammation ou de favoriser la lubrification des globes et leur guérison. Toutefois, les médicaments actuels nécessitent souvent une administration quotidienne répétée, qui a un effet négatif sur l’adhérence. Comment rendre ces traitements moins exigeants pour le patient tout en étant aussi efficaces? Une Ph.D québécoise d’origine française, la Dre Élodie Boisselier, professeure-chercheure à la Faculté de médecine de l’Université Laval et chercheuse au Centre de recherche du CHU de Québec, explore une piste inédite pour y parvenir. Débarquée au Québec il y a 11 ans pour y faire ses études post-doctorales, elle s’est établie ici et a obtenu sa nationalité canadienne. Intégrée au département d’ophtalmologie, elle a décidé d’utiliser son expertise en chimie pour contribuer au développement d’outils de diagnostic et de thérapies pour les pathologies oculaires. À la fin de son post-doctorat de cinq ans, elle a eu l’idée d’utiliser des nanoparticules d’or qui auraient pour effet de faciliter la transmission du médicament jusqu’à la cornée et d’en réduire la fréquence à une injection par jour. Elle dit avoir autour d’elle le soutien d’ophtalmologistes qui espèrent la voir concrétiser ses recherches. Des médicaments par gouttes qui se perdent En ophtalmologie, 90% des médicaments sont administrés par des gouttes oculaires. Or, en raison des barrières biologiques que forment le film lacrymal, les larmes et le clignement des yeux, à peine 0,02% des molécules actives dans une goutte vont traverser les tissus oculaires et rejoindre leur site d’action, souligne-t-elle. Donc, une grande partie du médicament se perd. Le grand défi auquel elle s’est attaquée est de contrer cette perte. Ses recherches ont permis de découvrir que les nanoparticules d’or, qui se présentent en solution liquide de couleur rouge vin, ont des propriétés mucoadhésives. Elles ont la capacité d’adhérer aux protéines qui se trouvent à la surface de l’œil et d’augmenter le temps de rétention des médicaments, ce qui a pour effet de les rendre plus efficaces. Des tests sont menés à son laboratoire sur des lapins pour vérifier leur biodistribution. Pas un médicament, mais un vecteur Les nanoparticules d’or ne forment pas en elles-mêmes un médicament. Elles sont utilisées en tant que vecteurs; elles collent à la muqueuse de l’œil, ce qui fait augmenter leur présence à la surface et leurs chances de rejoindre le site d’action. Si ce but est atteint, on sera capable de réduire la fréquence des gouttes, ce qui diminuera aussi les coûts de ces médicaments et leurs effets secondaires. À quel point le médicament sera-t-il davantage absorbé grâce à ce vecteur? On ne le sait pas. «On ne vise pas un pourcentage, mais d’être capable d’amener une plus grande quantité de médicaments afin que le patient ait à s’administrer des gouttes dans les yeux une seule fois par jour», dit la Dre Boisselier. L’an dernier, la Dre Boisselier a obtenu une subvention de 550 000$ pour une durée de cinq ans de la part des Instituts de recherche en santé du Canada pour faire avancer les travaux qu’elle mène et dirige à Québec. «On pourrait penser à plusieurs applications. Plusieurs pathologies oculaires pourraient faire l’objet de traitements contenant des nanoparticules d’or en tant que vecteurs», souligne-t-elle. Pour une des deux formes de la dégénérescence maculaire liée à l’âge, par exemple, le traitement est administré par injection intravitréenne avec une fréquence allant jusqu’à une fois par mois. Il faut passer dans l’œil pour injecter la molécule active afin qu’il aille agir au niveau de la rétine. Elle rêve que ce médicament puisse être administré sous la forme de gouttes intégrant des nanoparticules d’or. La chercheure québécoise se dit optimiste sur l’issue de ses recherches qui pourraient améliorer grandement l’efficacité des médicaments pour l’œil. Les médecins et les patients devront toutefois se montrer extrêmement patients: elle parle d’un horizon de 10 à 20 ans pour parvenir à des applications médicales courantes. Congrès sur les applications de l’or à Québec Avec son collègue le Dr Marc-André Fortin, la Dre Boisselier travaille actuellement à l’organisation en juillet 2022 d’un congrès international à Québec qui sera entièrement consacré à l’utilisation de l’or dans diverses applications technologiques. Cet événement unique va réunir 500 chercheurs qui travaillent autour du thème de l’atome de l’or. C’est un domaine de recherche en pleine expansion, dit-elle. On y traitera d’une douzaine de thématiques autour des applications de l’or, notamment en médecine. Ses utilisations ou ses possibilités sont très larges, en pathologie, dans le traitement de différents types de cancer, en diagnostic. Et peut-être dans le futur pour améliorer l’efficacité des traitements pour l’œil.

Des nanoparticules d’or pour améliorer l’efficacité des traitements de pathologies de l’œil

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