Covid-19 et syndrome inflammatoire multi-systémique de l’enfant: des défauts génétiques en cause

Une étude parue dans la prestigieuse revue Science pointe une série de mutations récessives dans les gènes des enfants infectés par une COVID-19 bénigne, qui seraient responsables du développement du syndrome inflammatoire multi-systémique, une affection rare et sévère qui s’apparente à la maladie de Kawasaki. L’étude1 avait pour objectif d’identifier une cause du syndrome inflammatoire multi-systémique (MIS-C), un autre phénotype grave lié au SRAS-CoV-2 qui survient principalement chez les enfants, généralement 4 semaines après l’infection2. Sa prévalence est estimée à environ 1 pour 10 000 enfants infectés3. Les enfants atteints de MIS-C ne présentent pas de pneumonie hypoxémique ni d’infection virale des voies respiratoires supérieures au début de la maladie. Toutefois, la plupart des cas montrent des résultats positifs aux tests de détection des anticorps contre le SRAS-CoV-24. Les premiers rapports sur le MIS-C le décrivaient comme une forme atypique de la maladie de Kawasaki5, car ses caractéristiques cliniques incluaient fièvre, éruption cutanée, douleurs abdominales, myocardite, lymphadénopathie, anévrisme coronaire et marqueurs biologiques élevés d’inflammation aiguë. La cause fondamentale du MIS-C demeurait cependant inconnue. Les chercheurs ont émis l’hypothèse que des erreurs innées d’immunité (IEI) monogéniques au SRAS-CoV-2 pouvaient sous-tendre le MIS-C chez certains enfants et que l’identification de ces erreurs pourrait clarifier les bases moléculaires, cellulaires et immunologiques de la maladie. Éléments de méthodologie Une cohorte internationale de 558 patients MIS-C (âgés de 3 mois à 19 ans, 60,4% de garçons) originaires d’Europe, d’Afrique, d’Asie et d’Amérique, vivant dans 16 pays différents, a été recrutée. Tous les patients répondaient aux critères diagnostiques de l’OMS pour le MIS-C. Les chercheurs se sont concentrés sur 5 de ces patients (2 garçons et 3 filles, âgés de 3 mois à 14 ans au moment du diagnostic) en raison de leurs caractéristiques génétiques: mutations responsables d’une perte de fonction dans une zone de leur génome affectant les gènes OAS1, OAS2 et RNASEL. Les caractéristiques cliniques et immunologiques des cinq patients étaient conformes à celles précédemment rapportées pour d’autres patients MIS-C6. L’ADN génomique a été extrait du sang total. Le séquençage de l’exome entier ou du génome entier a été réalisé dans plusieurs centres, dont le Genomic Core Facility de l’Institut Imagine (Paris, France) et le Yale Center for Genome Analysis (États-Unis). Pour le séquençage Sanger des variants OAS1, OAS2 et RNASEL, les régions pertinentes de ces gènes ont été amplifiées par PCR et purifiées par ultracentrifugation. Une analyse d’enrichissement axée sur les trois gènes candidats a été effectuée dans la cohorte de 558 patients atteints de MIS-C et de 1288 enfants et adultes présentant une infection asymptomatique ou paucisymptomatique par le SRAS-CoV-2 (témoins). Principaux résultats Des déficiences autosomiques de OAS1, OAS2 et RNASEL comme étiologies génétiques du MIS-C ont été retrouvées chez cinq enfants non apparentés. Les lignées cellulaires monocytaires déficientes en OAS-RNaseL, les cellules dendritiques dérivées de monocytes modélisant les génotypes des patients et les monocytes primaires des patients ont présenté des réponses inflammatoires excessives aux ARN double brin (ARNdb) intracellulaires, au SRAS-CoV-2, aux cellules infectées par le SRAS-CoV-2 et à leur ARN, ce qui fournit un mécanisme plausible pour le syndrome MIS-C. Chez ces patients, le MIS-C peut résulter principalement d’une réponse excessive des monocytes et d’autres phagocytes mononucléaires aux intermédiaires ou aux sous-produits de l’ARN du SRAS-CoV-2. D’autres mécanismes moléculaires ne peuvent cependant être exclus. Ainsi par exemple, les produits d’ARN liés au SRAS-CoV-2 qui déclenchent l’activation des phagocytes ou les superantigènes viraux qui activent les cellules T restent à découvrir. Chez d’autres patients, le MIS-C peut résulter d’IEI qui peuvent ou non être liées à la voie OAS-RNaseL. Cela dit, les données de l’étude suggèrent que l’OAS1, l’OAS2 et la RNaseL humaines sont chacune essentielles à la régulation correcte de l’immunité contre le SRAS-CoV-2.

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