Clinique Post-COVID de Montréal: qu'a-t-on appris un an après?

Dirigée par la Dre Emilia Liana Falcone, chercheuse à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM) et infectiologue au CHUM, la clinique de recherche IRCM post-COVID-19 (IPCO) a été mise sur pied pour comprendre les effets à long terme d’une infection au SRAS-CoV-2. Pour être considéré comme atteint de la COVID longue, un patient doit répondre à trois critères selon l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS). Tout d’abord, il doit y avoir eu une infection initiale à la COVID-19 confirmée ou plausible, une présence de signes et symptômes au-delà de quatre semaines après l’infection initiale et une persistance de signes et symptômes qui ne peuvent pas être expliquées par une autre pathologie et qui n’existaient pas avant l’infection. Grâce à un financement du gouvernement du Québec, la clinique a pu accueillir ses premiers patients en février 2021. Chaque patient qui y est admis fait partie d’un protocole de recherche tout en se voyant offrir des évaluations cliniques et physiologiques complètes afin d’étudier les effets indésirables de la maladie. Des échantillons sont également prélevés chez les patients afin de constituer une biobanque. «Nous essayons de comprendre le mécanisme sous-jacent à la longue COVID. On fait aussi de l’évaluation postvaccinale en regardant l’évolution des symptômes des patients après qu’il y ait eu une, deux ou trois doses, ou encore après une réinfection», explique la Dre Falcone. Depuis son ouverture, entre 200 et 250 patients participent au projet de recherche. L’objectif est d’atteindre un échantillon total de 570 patients. Tous seront suivis durant une période de deux ans après leur infection. Avancement clinique En seulement un an, la Dre Falcone explique que l’on en a beaucoup appris sur la COVID longue et ses symptômes. La chercheuse précise que la littérature rapporte plus de 200 symptômes différents tels que des maux de tête, de la fatigue chronique, des troubles du goût ou de l’odorat, des troubles de mémoire ou de la concentration et même des symptômes anxieux ou dépressifs. «Nous voyons des cas où les symptômes perdurent au-delà d’un an et même presque deux ans», souligne la Dre Falcone. Certains facteurs de risques de la longue COVID semblent également avoir été identifiés. «Quelques papiers cliniques ont démontré que plus l’infection à la COVID-19 est grave, plus de risques les patients auraient de développer la longue COVID», donne en exemple la médecin. Certaines études suggèrent aussi que les femmes semblent également être plus à risque de développer la COVID longue, ainsi que les personnes diabétiques ou avec un indice de masse corporelle plus élevé. «Par contre, on voit aussi des patients en parfaite santé qui développent la maladie», précise-t-elle. Accompagner ses patients Selon la direction nationale de santé publique du Québec, entre 40-50% des Québécois ont contracté la COVID-19 depuis le début de la pandémie. On estime donc qu’un nombre important de Québécois pourrait être atteints de la COVID longue. Malheureusement, les places dans les cliniques spécialisées sont imitées, c’est pourquoi les professionnels de la santé doivent être en mesure d’accompagner leurs patients atteints de la maladie, estime la Dre Falcone. Selon la médecin, la première étape dans la prise en charge des patients atteints de la COVID longue est d'identifier la maladie. «J’entends encore des témoignages de patients malades qui se font dire par leurs professionnels de la santé que c’est seulement de la fatigue ou que les symptômes sont psychosomatiques. La COVID longue existe, même si on ne la comprend pas bien encore», rappelle-t-elle. Par la suite, la Dre Falcone recommande de faire l'historique médical complet du patient. Elle suggère de noter l'évolution des symptômes dans le temps, en commençant par l’état de la santé du patient avant l’infection, pendant l’infection et après celle-ci. «Il faut faire cet exercice, car certains antécédents médicaux peuvent être présents avant l’infection, mais peuvent être exacerbés par la maladie», dit-elle. Par exemple, un patient pourrait faire de l’insomnie avant d’avoir été infecté par le virus, et que cette insomnie devienne plus marquée par après. Diagnostiquer la COVID longue n’est pas chose facile, précise la Dre Falcone. «Il est possible de développer la COVID longue, même si on a été asymptomatique lors de l’infection initiale. Les symptômes peuvent apparaître plus tard, varier et fluctuer en intensité, d’où l’importance de faire une évaluation dans le temps», ajoute-t-elle. Autre difficulté, la plupart des symptômes de la COVID longue peuvent être associés à d’autres maladies. La Dre Falcone recommande aux professionnels de la santé de se référer aux outils de l’INESSS, dont un outil à la prise en charge de la COVID longue, publié en juillet 2021. Le document présente une liste non exhaustive des symptômes reliés à l’affection, ainsi qu’une liste d’analyse et d’investigation pouvant être faite. Finalement, la chercheuse accorde une grande importance à la réadaptation des patients et à leur accompagnement par des ergothérapeutes ou des physiothérapeutes. «La longue COVID nous démontre comment il est important d’avoir une approche thérapeutique holistique avec ces patients. Une bonne gestion de l’énergie est la clé pour assurer un bon rétablissement», explique-t-elle. Quelques initiatives de cliniques de réadaptation pour COVID longue ont été mises sur pied. C’est le cas notamment au CISSS Montérégie-Ouest et au CISSS de Laval, qui offrent un service multidisciplinaire de réadaptation aux personnes habitant sur leur territoire présentant des séquelles persistantes de la COVID-19.

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