Ce que nous pouvons apprendre des rares cas où les soins virtuels aboutissent à un décès ou à un préjudice grave

Une évaluation britannique concernant les rares incidents au cours desquels des soins primaires dispensés par téléphone ou par vidéo se sont soldés par le décès ou un grave préjudice pour un patient donne des indications sur ce qui peut être fait pour garantir que l'utilisation des soins virtuels reste sûre.L'étude publiée dans BMJ Quality and Safety a évalué 95 incidents de sécurité graves impliquant ce que les chercheurs appellent des «interactions à distance», entre 2015 et 2023. L'étude a également évalué l'utilisation des soins virtuels dans un panel varié de 12 cabinets de médecine générale au Royaume-Uni entre la mi-2021 et la fin 2023.De nombreux comptes rendus de l'étude - publiés dans les médias britanniques - ont mis l'accent sur les inconvénients des soins virtuels.Par exemple, le Daily Mail a titré: «Les patients meurent de consultations à distance chez le médecin généraliste alors qu'une étude majeure alerte sur le fait que les rendez-vous virtuels et téléphoniques peuvent passer à côté de maladies graves». Cependant, les auteurs de l'étude soulignent à plusieurs reprises dans l'article la rareté des événements indésirables graves associés aux soins virtuels.Trish Greenhalgh, l'un des auteurs de l'étude et professeure de sciences des soins primaires à l'Université d'Oxford, a déclaré sur la plateforme de médias sociaux Bluesky: «Cet article explique PRINCIPALEMENT (elle le souligne) que les soins à distance dispensés par les médecins généralistes sont remarquablement SÉCURITAIRES. Nous avons suivi 12 cabinets de médecins généralistes pendant deux ans, à la recherche (entre autres) de preuves de préjudices causés aux patients par les consultations à distance. Nous n'en avons trouvé AUCUNE.»À lire aussi: Soins virtuels en médecine spécialisée: des promesses à peaufinerDans un billet associé, elle ajoute: «L'une des grandes conclusions de cette étude est que les incidents liés à la sécurité sont presque toujours ÉVITÉS grâce aux actions consciencieuses du personnel de première ligne (des réceptionnistes aux médecins en chef).»Dans leur analyse de la série de problèmes de sécurité associés aux soins à distance, les auteurs de l'étude identifient un large éventail de facteurs contributifs, en particulier au niveau du système.«L'introduction du triage des patients à distance et l’essor des consultations à distance dans les soins primaires au Royaume-Uni ont eu lieu à un moment où le système subissait une pression sans précédent (un secteur de soins primaires en sous-effectif et en manque chronique de ressources, tentant de faire face à une pandémie)», note l'étude.Les problèmes inhérents au système de santé associés aux événements indésirables et identifiés dans l'analyse sont les suivants:des voies d'accès techniquement complexes que les patients ont trouvé difficiles ou impossibles à emprunter, et qui obligent le personnel non-clinique à porter des jugements cliniques ou liés à la clinique.Une forte demande, des pénuries de personnel et une forte rotation du personnel clinique et de soutien qui rendent les rencontres à distance intrinsèquement risquées.Les épisodes uniques de soins pour un problème donné impliquent souvent plusieurs rencontres ou tâches réparties entre le personnel clinique et non-clinique.Les routines organisationnelles ne sont pas suffisamment adaptées aux soins virtuels.La formation, la supervision et l'intégration du personnel sont rendues plus difficiles lorsque la plupart travaillent à distance.La communication est identifiée comme un facteur important associé aux événements indésirables et aux soins virtuels.«De nombreux incidents de sécurité ont été caractérisés par des informations insuffisantes ou inexactes pour diverses raisons. Parfois, la consultation téléphonique était trop courte pour appréhender le problème; le clinicien n'a posé que peu ou pas de questions pour établir un rapport, obtenir une histoire complète, sonder les réponses du patient pour obtenir des détails supplémentaires, confirmer ou exclure les symptômes associés et s'enquérir des comorbidités et de la médication. La vidéo fournissait quelques indices visuels, mais ceux-ci étaient souvent limités à la tête et aux épaules, et les photographies étaient parfois de mauvaise qualité.»À lire aussi: États-Unis: Amazon ajoute à sa clinique virtuelle des visites de télémédecine vidéoL’étude pointe également les charges supplémentaires auxquelles sont confrontés les patients et les soignants du fait de l'utilisation des soins virtuels. «Étant donné l'importance accrue des antécédents dans les consultations à distance, les patients qui n'avaient pas la capacité de communiquer et de répondre aux attentes des cliniciens étaient fortement désavantagés», indique l'étude. «Plusieurs incidents de sécurité ont été liés à la maîtrise limitée de la langue et de la culture du clinicien par les patients, ou à des vulnérabilités spécifiques telles que les troubles de l'apprentissage, les déficiences cognitives, les déficiences auditives ou la neurodiversité.»Dans une section consacrée aux enseignements à tirer de l'étude, les auteurs notent que les soins virtuels reposant davantage sur l'anamnèse et le dialogue, «la communication verbale est encore plus essentielle à la mission». Ils concluent en indiquant que «l'évaluation clinique fournit moins d'informations lorsqu'un examen physique (et même un aperçu visuel de base) n'est pas possible. Par conséquent, la consultation à distance présente un degré plus élevé d'incertitude inhérente».Dans leur résumé de l'article, les auteurs rendent hommage au personnel de première ligne: «Les rares incidents de sécurité (impliquant un décès ou un préjudice grave) dans les consultations à distance peuvent être attribués à diverses causes cliniques, communicatives, techniques et logistiques. Les rencontres téléphoniques et vidéo en médecine générale se déroulent dans un contexte à haut risque (extrêmement occupé et parfois en sous-effectif) dans lequel les flux de travail à distance peuvent ne pas être optimisés. Le personnel de première ligne fait preuve de créativité et de jugement pour rendre les soins plus sûrs.»Pat Rich est un journaliste canadien spécialisé dans le domaine de la santé et ancien rédacteur en chef du Medical Post, une publication soeur de ProfessionSanté.ca. Cet article a été publié à l'origine sur son site web.

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