Ajustement de la thérapie: les pharmaciens communautaires moins à l’aise que ceux en GMF

Entre les mois de mars et mai 2021, 209 pharmaciens, dont 63 pratiquant en GMF et 146 œuvrant en officine, ont répondu à un sondage du RQP GMF sur l’aisance de ces professionnels à prendre en charge le suivi et les ajustements de plusieurs thérapies. Une différence dans l'aisance est notable entre les deux milieux de pratique, notamment en ce qui a trait aux problèmes de santé mentale. Par exemple, plus de 80% des pharmaciens en GMF se disent assez ou totalement à l’aise de prendre en charge un patient souffrant de trouble dépressif, peu importe sa situation clinique. Par contre, seulement de 20% à 50% des pharmaciens communautaires ont cette aisance si ce patient a d’autres troubles psychiatriques, des échecs antérieurs à un antidépresseur ou des comorbidités cardiovasculaires. Pour l’anxiété, plus de huit pharmaciens sur dix s’estiment assez ou totalement à l’aise pour ajuster sa thérapie, sauf s’il y a eu échec antérieur à un traitement. En comparaison, leurs collègues en officine sont moins à l’aise, notamment lorsque le patient a des troubles psychologiques, consomme plusieurs médicaments ou lorsqu’il y a une substitution à effectuer entre deux agents. Pour les troubles bipolaires, peu importe leur milieu de travail, la majorité des pharmaciens ne sont pas totalement à l’aise d’effectuer l’ajustement de la thérapie. Toutefois, c’est surtout vrai pour les pharmaciens communautaires: moins de 20% d’entre eux se disent totalement ou assez à l’aise lorsque le patient consomme plusieurs molécules, comparativement à 20 à 50% des pharmaciens qui ont cette aisance en GMF. «Les pharmaciens en GMF ont un accès au dossier médical électronique, ils ont accès au diagnostic et ont une proximité avec le médecin, que n’ont pas les pharmaciens communautaires, explique l'une des auteures du sondage, Léonie Rouleau. De plus, ils ont plus de temps pour faire des suivis de qualité. Par exemple, lorsqu’on veut faire un suivi avec un patient en santé mentale, il faut s’asseoir dans un bureau et avoir un certain temps pour le faire», poursuit la pharmacienne communautaire et membre du comité de chercheurs du RQP GMF. Mis à part pour les troubles de santé mentale, les pharmaciens en GMF se sentent plus à l’aise de prendre en charge les patients souffrant de douleur chronique pour la plupart des situations cliniques. Par exemple, plus de 80% de ces pharmaciens se sentent assez ou totalement à l’aise lors du sevrage d’opioïdes ou des changements d’opioïdes. Entre 50% et 80% des pharmaciens ont cette aisance en communautaire. Le manque d’expérience, de connaissances ou de directives claires (des cibles ou des intervalles de suivi, par exemple) freine l’aisance des pharmaciens communautaires, ont relevé les auteurs de l’enquête. Toutefois, Léonie Rouleau est confiante que le niveau d’aisance de ces pharmaciens rejoindra celui de leurs collègues en GMF d’ici quelques années. «Les pharmaciens en GMF se sont déjà fait la main sur des situations cliniques simples, et maintenant ils sont rendus à se faire la main sur celles qui sont plus difficiles. En communautaire, nous sommes en train de suivre le même chemin», raconte-t-elle. Un manque de temps Le temps manque en pharmacie communautaire pour faire le suivi et prendre en charge l’ajustement de la thérapie. Selon le sondage, un pharmacien sur quatre réserve moins de 10% de ses heures de travail aux suivis cliniques. En contrepartie, 38,4% consacrent de 10% à 20% de leurs heures travaillées à ces suivis, alors qu’un pharmacien sur cinq passe de 20% à 30% de son temps à effectuer ce travail. Le manque de temps dédié aux interventions et aux suivis cliniques et l’intégration difficile dans le flux de la chaîne de travail représentent, de loin, les deux principaux obstacles des pharmaciens à la prise en charge, aux ajustements et aux suivis dans leur milieu de pratique. «Il y a beaucoup d’actes et d’ajustements qui ne sont pas réalisés parce qu’on n’a pas le temps», indique Léonie Rouleau. Le manque d’organisation dans le suivi et les interventions à effectuer, l’insuffisance de la rémunération pour que le modèle soit viable et le manque d’outils cliniques font également partie des obstacles à la prise en charge. Améliorer l’organisation Afin d'améliorer leurs interventions ou leurs suivis cliniques, plus de la moitié des répondants estiment qu’il faut améliorer la structure organisationnelle de leur milieu et mettre sur pied des tableaux récapitulatifs. De plus, plus du tiers des pharmaciens estiment qu’ils auraient besoin de davantage de formation continue, alors que 22,6% croient qu’ils auraient besoin du formulaire de demande de suivi conjoint envoyé par le médecin. Discuter des cas complexes avec d’autres pharmaciens, avoir une banque d’exemples d’interventions possibles et obtenir le formulaire de demande de consultation envoyé par le médecin fait également partie des solutions pour mieux effectuer les suivis cliniques en pharmacie communautaire.

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