Admissions en médecine: des hausses accueillies avec réserve

De passage à Trois-Rivières la semaine dernière, François Legault a annoncé son intention d’augmenter «progressivement» et «réalistement» le nombre d’admissions dans les programmes de médecine. L’objectif: accueillir 660 étudiants supplémentaires au cours du prochain mandat de la CAQ, soit de 2022 à 2026. À Gatineau quelques jours auparavant, la cheffe du PLQ, Dominique Anglade, a quant à elle promis qu’un gouvernement libéral admettrait 1000 étudiants de plus dans les facultés de médecine d’ici 2027. Ces annonces, qui poursuivent les mêmes desseins - résorber la pénurie de main-d'œuvre médicale et renforcer l’accès aux soins de première ligne - ont été plutôt bien accueillies par les médecins en formation, qui émettent néanmoins des réserves. «C’est une bonne nouvelle que la classe politique se soucie du manque de ressources médicales», observe la présidente de la Fédération des médecins résidents du Québec (FMRQ), la Dre Jessica Ruel-Laliberté. Elle se demande toutefois si ces promesses sont réalisables. «On pense que oui, car rien n’est impossible, mais il va falloir attribuer les ressources nécessaires. C’est la question importante, car aujourd’hui, les facultés de médecine ont de la misère à accueillir 50 étudiants en plus», signale la résidente qui suit un programme de surspécialité en gynéco-oncologie au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM). Même son de cloche du côté de la Fédération des étudiants en médecine du Québec (FMEQ). La hausse des admissions est vue d’un bon œil, mais «nous sommes soucieux de la faisabilité de l’augmentation suggérée, qui risque de compromettre la qualité de l’éducation médicale au Québec», indique la déléguée aux affaires politiques de la FMEQ, Vanessa Bisson-Gervais. Elle signale notamment que plusieurs milieux de stage sont déjà saturés. «En médecine de famille, par exemple, c’est assez fréquent qu’il manque de salles de consultation pour qu’on puisse voir les patients seul, alors on fait plus de l’observation.» La saturation des stages d’externat, également relevée par la FMRQ, «pose un double enjeu: d’exposition à différents milieux de soins et d’exposition clinique», souligne la Dre Ruel-Laliberté qui se demande comment sera absorbé le surplus d’étudiants. «Ça prend des médecins disponibles en CHU pour les encadrer.» Ce qui n’est pas le cas présentement. Lire aussi: 11,2 M$ pour la formation des futurs médecins Idem pour l’internat. «Si on augmente les admissions, il faut augmenter les postes de résidences en conséquence et créer ensuite des postes de médecins pour que les gens puissent pratiquer au Québec», affirme Vanessa Bisson-Gervais. Elle est convaincue que la hausse du nombre de médecins n’est pas la seule solution pour améliorer l’accès à la première ligne. «Il y a aussi l’interdisciplinarité et on manque également d’infirmières, de physiothérapeutes, de psychologues, etc.» Revaloriser la pratique en région La déléguée de la FMEQ souligne qu’en augmentant les admissions, on augmente le nombre absolu de médecins, «mais s’ils ne vont pas en médecine de famille, le problème reste entier». Cette année, 65 postes de résidences en médecine familiale sont ainsi restés vacants, essentiellement en régions éloignées et semi-éloignées. Selon elle, il faut donc renforcer l’attractivité de la pratique en région et les campus de médecine décentralisés (à Trois-Rivières, Saguenay, Rimouski, Lévis, Gatineau et en Abitibi) participent à cet effort. «J’ai fait mon stage en médecine de famille à Val-d’Or et je considère possiblement de faire une résidence en région pour retrouver cette pratique-là», illustre Vanessa Bisson-Gervais. Lire aussi: Les finissants continuent de bouder la médecine de famille La FMEQ met sur la table une autre proposition, qui consisterait à bonifier la cote R des étudiants en provenance des régions afin favoriser leur admission, ce qui créerait des contingents de futurs médecins plus enclins à pratiquer dans leur région d’origine. Elle propose également de rendre obligatoires des stages en milieu rural pour tous les étudiants en médecine du Québec. Pour l’année 2022-2023, 969 étudiants doivent être admis dans l’une des quatre facultés de médecine du Québec, selon des chiffres publiés par le gouvernement. Ils seront 1003 en 2023-2024, 1021 en 2024-2025 et 1050 en 2025-2026. Voire un peu plus si la CAQ ou le PLQ sont élus le 3 octobre prochain et qu’ils tiennent leur promesse électorale.

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